Il arrive souvent que des auteurs de conduite en état d'ivresse échappent de justesse aux services de sécurité. Et là, c'est le drame car, quelques kilomètres plus loin, une catastrophe arrive. La collision fait des morts, des blessés et beaucoup de dégâts matériels qui deviennent alors le dernier des soucis des familles des victimes. Cette fois, le gus au volant est arrêté et inculpé. Avec 1,35 g d'alcool dans le sang, le détenu a vu hadj Barik faire la moue, lui qui n'avait qu'une semaine depuis son retour des lieux-saints où il a effectué le petit pèlerinage en plein ramadhan. L'inculpé ignorait le statut du juge. Ce dernier va appliquer la loi et elle n'est pas facile, car née du dernier moule. Maître Ismaïl Ould Ammar, l'avocat de Hocine H., détenu, inculpé de conduite en état d'ivresse, a fait, au cours de sa courte mais efficace intervention, de la jurisprudence, une jurisprudence, il est vrai, orpheline, car depuis des années, ce mot semble être maudit pour être introduit dans le quotidien de la justice, des magistrats et des avocats. - «Si les motards ne l'avaient pas arrêté, il serait arrivé chez lui et personne n'aurait su l'état d'ivresse. Donc, le délit aura été alors, un délit préventif», avait souligné, le sourire en coin, le conseil. - «Non, maître, coupe hadj Rabah Barik, le juge de Koléa (cour de Blida), c'est l'intervention qui a été préventive, mais je vous approuve dans votre démarche actuelle pour ce qui est du délit préventif», avait ajouté le magistrat qui demeure tout de même un ardent partisant de la jurisprudence, un ardent fou, qu'il lui arrive probablement de l'enfoncer dans ses attendus lors de la rédaction de ses jugements. Quant aux faits eux-mêmes, ils resteront ce que le procès-verbal des gendarmes avait souligné. Et ce n'est que dans les salles d'audience que l'on mesure l'action efficace des gendarmes qui ne donnent jamais l'impression d'être dépassés lors de leurs interventions. Un travail de gens d'uniforme excellemment formés, disciplinés, ne baissant jamais la garde, surtout pour ce qui est du «terrorisme routier». Ali Z. était au volant ivre mort, il avait pris le risque de conduire en état d'ivresse dans la semaine de l'entrée en vigueur du nouveau code de la route et ses «grenades quarante-cinq morceaux» aux conséquences catastrophiques pour ceux qui sont pris en flagrant délit. Ce qui est tout de même inouï, c'est que Ali Z. avait eu l'outrecuidance de dire : «Si les gendarmes ne m'avaient pas arrêté, je serais arrivé sain et sauf chez moi, Allah était à vos côtés.» - «Oh là, oh là inculpé, ce n'est pas le moment d'évoquer Allah. C'était plutôt Bacchus et Satan qui étaient à vos côtés. La preuve ? Les gendarmes vous ont interpellé à temps avant que vous ne soyez tué ou que vous n'ayez tué. Ici il n'y pas de “si” ni de “mais”, il n'y a que des certitudes», balance sans sourire Barik qui prend acte des demandes de Samir Hamel, le procureur. Six mois de prison ferme et le retrait du permis de conduire pour une année en plus d'une amende. Et le verdict a permis aussi au président hadj Barik de balancer un petit prêche en direction de l'assistance. Dommage qu'il n'y ait pas eu en ce dimanche des gendarmes dans la salle d'audience.