A la simple question «comment ça va ?» certaines personnes, des angoissés s'engouffrent dans un chapelet de plaintes et de questionnements sur leur état physique, font l'inventaire de leurs bobos quotidiens, vous parlent de l'épidémie de cancer ou du régime auxquels ils s'attellent courageusement… Bref, ils s'inquiètent et vous expriment que l'essentiel de leurs inquiétudes se fixe sur leur état de santé. Sont-ils, comme le malade imaginaire, de véritables hypocondriaques ? Pas forcément. Pour de nombreux psychiatres et analystes, l'hypocondrie, cette forme d'anxiété fixée sur le corps qui a le plus souvent été perçue comme «amusante» et a donné lieu à des tas d'histoires drôles, n'est que dans assez peu de cas repérée comme une pathologie lourde. Elle frappe majoritairement les hommes sans pourtant épargner les femmes. En revanche, les épisodes hypocondriaques peuvent toucher la plupart d'entre nous. Des mots déclencheurs de crise Mais n'est pas un vrai hypocondriaque qui veut. Le véritable intérêt est de faire comprendre que l'hypocondriaque a besoin de plusieurs facteurs pour «se payer le luxe de l'être». D'abord, le milieu d'origine. La plupart des hypocondriaques ont eu accès très tôt, dans la boîte à pharmacie ou la bibliothèque familiale, à des centaines de notices de médicaments, à des dictionnaires médicaux ; ou alors ils ont un grand oncle chirurgien, etc. Ensuite, ils cultivent une grande ambivalence par rapport à ce milieu médical qui, à la fois, les attire et qu'ils veulent mettre en défaut à chaque fois que leurs symptômes restent non identifiés. Être fasciné et en même temps disqualifié, un conflit qui évoque un rapport très particulier au père. «Dans beaucoup de cas d'hypocondrie, il s'agit d'un père qui, aux yeux de l'extérieur, semble un homme respecté, important, voire créateur, mais dont le fils sait qu'il ne tient pas du tout ses engagements, que c'est une image derrière laquelle se cachent de nombreuses failles et faiblesses.» Enfin, pour faire un hypocondriaque, il faut l'entourage qui va avec : une épouse toujours à l'écoute, attentionnée. Jusqu'au jour où celle-ci, harassée par l'anxiété permanente qui régit le quotidien du couple, craque et décide de voir un thérapeute. Peut-être, enfin, le signe d'un progrès.