Chaque année, des milliers de naissances hors mariage sont enregistrées dans notre pays. Selon les sources officielles, ils seraient 3000 enfants à venir au monde dans ces conditions, alors que d'autres avancent le chiffre de 7000 naissances illégitimes. Ceci alors que dans un récent sondage réalisé par notre quotidien, plus de 90% des Algériens sont pour des relations sexuelles dans le seul cadre du mariage. C'est dire si le phénomène fait peur. La question cruciale est de savoir ce que devient cette progéniture indésirable. Si une infime portion des mères biologiques font preuve de courage et décident de garder leur enfant malgré le regard désapprobateur de la société, que devient la majeure partie de ces enfants ? Combien ont la chance d'être adoptés ? Leur venue au monde de cette façon et qui fait d'eux des personnes indésirables» passe automatiquement par un séjour plus ou moins long en pouponnière, alors que la place du nouveau-né est auprès de sa génitrice, surtout au tout début de sa vie. Un séjour qui va laisser des séquelles indélébiles sur le plan affectif. Les derniers chiffres publiés par le département de la solidarité du temps de Ould Abbès attestent que sur les 29 000 enfants privés de famille ou nés hors mariage durant les dix dernières années, 21 000 ont été pris en charge dans le cadre de la kafala par des familles en Algérie et à l'étranger. Quelles sont les conditions pour ouvrir droit à la kafala ? Où doit d'adresser toute personne désireuse d'adopter un enfant ? C'est à la Direction des actions sociales (DAS) qu'incombe la mission de recevoir le couple désirant accueillir un enfant ou un bébé, selon l'assistante sociale de cette institution. Un dossier remplissant toutes les conditions requises par la loi est exigé, comprenant notamment une quittance de loyer ou de propriété d 'un logement, un justificatif de ressources, un certificat médical, un extrait de mariage et un extrait du casier judiciaire des époux. En somme, des preuves justifiant les conditions d'aptitude à élever un enfant. Une enquête, dont la durée varie entre trois et six mois est ensuite entamée, qui vérifiera les données mentionnées dans le dossier, en plus de l'état psychologique des futurs parents. L'étape de la pouponnière Le dossier est ensuite transféré vers la pouponnière choisie par le couple, qui peut être privée ou étatique. «Arrivés à cette étape, les parents sont soumis à des instructions liées au respect des délais de l'adoption fixée à trois mois et un jour au minimum, selon une pédiatre à la pouponnière de Palm Beach. «En effet, il est conseillé au couple d'attendre cette période avant de prendre le bébé. Dans le cas contraire, il n'aura pas le droit de protester si l'un des parents biologiques se manifeste pour le reprendre», nous dira-t-elle. Six ou une année, voire deux ans peuvent toutefois s'écouler entre le moment de l'entame des démarches et l'accueil du bébé. Les raisons en sont le choix du sexe, qui peut ne pas être présent au niveau des pouponnières. Il n'en reste pas moins que les demandes d'adoption de filles sont plus importantes que celles des garçons, selon notre source. Si le sexe du bébé est un paramètre accordé aux parents adoptifs, celui du bébé à adopter ne l'est pas. «Au moment de confier un enfant, nous voyons loin. C'est pour cette raison que nous faisons en sorte que le bébé ressemble à l'un des futurs parents ou aux deux, ce qui serait merveilleux. Cela évitera plus tard à l'enfant adopté une marginalisation», nous affirme-t-elle. Et d'ajouter : «pour faciliter le contact des deux parties, les futurs parents sont invités à venir voir l'enfant quelques jours à la pouponnière avant de le prendre. Cette façon de procéder est préconisée pour que le changement ne soit pas trop brutal pour le bébé. C'est à cette étape que nous voyons s'il y a un rejet ou non de l'enfant envers ceux qui sont appelés à devenir ses parents. Dans le cas, rare certes, où le rejet est réel et insistant, nous présentons un autre bébé au couple. Il est primordial que celui-ci se familiarise avec ses parents adoptifs et qu'il se sente bien avec eux. Pour nous, c'est là les prémices d'une adoption réussie», soutient la pédiatre. Plus dur pour les couples immigrants La démarche pour le couple immigrant est identique à part que ce dernier est appelé à s'adresser au consulat d'Algérie en France, avant de se rendre à la DAS, en Algérie, selon notre assistante sociale. Après les renseignements d'usage, un dossier identique est exigé, en plus d'un agrément français pour les binationaux. Un test HIV lui est également imposé, ainsi que la présence de deux témoins de nationalité algérienne et ne portant pas le même nom de famille que les demandeurs pour témoigner en faveur de l'aptitude des parents à adopter. Transmis au ministère des Affaires étrangères, le dossier est étudié par le Conseil général de la région dont la mission est de suivre l'affaire jusqu'à la prochaine étape qui se déroulera en Algérie. C'est là qu'intervient la DAS, qui recevra le couple et l'orientera vers la pouponnière pour l'accueil du bébé. C'est encore à la DAS d'orienter le couple vers le tribunal adéquat, qui fournit les documents nécessaires, dont l'attestation de placement de l'enfant avec l'adresse des parents, l'autorisation de sortie du territoire national, ainsi que l'attestation d'hébergement qui servira à l'établissement du passeport de l'enfant. Si la démarche semble simple, dans la réalité les choses se présentent autrement, car «bien qu'elle soit un concept international, la kafala n'est pas reconnue au sens propre du terme dans les pays occidentaux qui reconnaissent plutôt l'adoption», explique la pédiatre. D'où la difficulté pour les couples installés à l'étranger «d'accueillir» un enfant à partir de l'Algérie et ce, à cause du durcissement du consulat en France. Ce qui fait que la procédure est plus longue, l'attente pouvant durer jusqu'à deux ans.