Quel plaisir reste-t-il aux cinéphiles quand aller au cinéma demande de jouer des coudes, pour accéder à la salle, et qu'une fois dedans, le silence pour suivre son film ne vient jamais ? C'est l'ambiance qui règne à chaque fois qu'un grand film est programmé dans les rares salles de cinéma qui restent fréquentables sur la place d'Alger. Comme ce fut le cas, il y a quelques jours au niveau de la salle Cosmos avec la projection du film Harry Potter. Si des agents de sécurité étaient passés par là, ils auraient cru qu'il s'agissait d'une manifestation. Les premiers arrivés s'étaient agglutinés contre la porte d'entrée et nous vous laissons deviner la cohue qui s'en suivit au moment de l'ouverture des portes. La ruée vers l'or n'a pas dû être pire. Hommes, femmes, enfants se bousculaient honteusement. «Si un jeune homme n'avait pas soulevé ma fille de 4 ans, elle aurait été piétinée», a rapporté une jeune maman, enceinte, qui n'a pas été épargnée. Pire la personne qui l'a bousculée était une ...femme. Voilà pour l'étape à extérieur, qui n'a rien à envier à ce qui va se passer dans la salle de projection. A l'entrée, tout le monde s'arrête. Rebousculade pour montrer patte blanche, sinon pas de film ? Pensez bien que non, tous vont accéder dans la salle, puis on verra comment entasser tout ce beau monde ! Certains ont vu le film debout Avant la projection, les gens se dirigent vers les lieux d'aisance pour les salir en un temps record, et vont s'acheter la gourmandise avec laquelle ils vont «saucer» leur film. Comme aux Etats-Unis où les gens rentrent tous avec leur pot de corn flakes, ici ce sont les chips en paquet qui vont être à l'honneur. Et quels paquets ! Ceux en papier glacé, qui crissent dès que vous plongez vos doigts à l'intérieur. Imaginez une salle bondée où chaque individu - ou presque, puisqu'ils y a heureusement des personnes qui ont banni ces grasses pétales de leur consommation et difficilement de celle de leurs chérubins . Et quand, au bruit du papier s'ajoute celui du grignotage, vous avez une seule envie : quitter la salle. Mais vous ne pouvez pas, car vous êtes là, avant tout pour faire plaisir à votre enfant, chéri qui ne peut pas rater Harry Potter ! Alors que la logique voudrait que la vente de tickets se fasse en tenant compte du nombre de places de la salle, la souche du carnet faisant foi, chez nous c'est le montant de la cagnotte qui compte. D'où la pléthore de spectateurs. Si les plus irrités quittent la salle, d'autres se disent dans leur droit, refuseront cette alternative. Et c'est debout que certains vont voir le film ou assis carrément sur les marches, d'autant qu'aucune ouvreuse ne viendra les déranger. Passons sur la qualité de la projection, où le son est un supplice pour les tympans ! Voilà comment se déroule la projection de film dans une salle de cinéma aujourd'hui Regrets quand tu nous tiens Reviendra t-il le temps, où les gens étaient si disciplinés, que les bousculades étaient impensables, même en rêve, à l'entrée d'une salle de ciné. Bien au contraire, il n'y avait là que des gens zen et nullement pressés. Pourquoi d'ailleurs puisque leur ticket mentionnait la place qui leur était désignée et qu'ils étaient accueillis par une ouvreuse. Assise sur le strapontin le plus proche de la sortie, elle attendait les clients et se levait immédiatement pour les guider avec sa lampe de poche. Elle était bien utile, évitant aux retardataires de faire une chute dans l'obscurité, vérifier que les gens sont bien installés et demander aux fumeurs d'éteindre leurs cigarettes ou cesser de bavarder. Tout cela, contre un petit pourboire. Encore un métier qui a disparu de la nomenclature des métiers en Algérie.