Les villes tunisiennes sont toujours agitées par des manifestations, en solidarité avec les habitants de la région de Sidi Bouzid. Hier, des rassemblements ont été organisés à Tunis que les forces de l'ordre ont tenté d'empêcher. Depuis plus d'une semaine, la contestation ne cesse de prendre de l'ampleur en Tunisie. Plusieurs syndicats, dont ceux de l'enseignement secondaire, de la poste et des caisses de sécurité de la santé ont lancé un appel à manifester. Les manifestants se sont rassemblés devant le siège de l'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), au centre-ville. Malgré un imposant dispositif de police à la place Mohamed Ali, ils ont défilé, scandant des slogans sur «le droit de travailler», le «développement équitable entre les régions» et la «libération des prisonniers de Sidi Bouzid». D'après les enregistrements vidéos réalisés à l'aide de portables et diffusés par la télévision qatarie Al-Jariza, l'appel de l'UGTT à manifester a été suivi dans d'autres villes tunisiennes. À Sidi Bouzid, face au palais de justice, des avocats en robe noire ont brandi des panneaux exprimant leur soutien aux habitants de la région. Le 19 décembre, un jeune homme s'était immolé par le feu devant la préfecture, après s'être fait confisquer la marchandise qu'il vendait illégalement, d'après les autorités. Il aurait survécu, mais se trouverait dans un état critique. Cinq jours plus tard, un autre jeune s'est mortellement électrocuté en public en grimpant au sommet d'un poteau électrique dans la ville Sidi Bouzid. Des affrontements entre des manifestants et la police, faisant un mort, s'en sont suivis. Dimanche, un troisième homme diplômé mais sans travail a été retrouvé mort dans un puits de la région. Les autorités contestent qu'il s'agisse d'un suicide. «On en a marre. Aujourd'hui, le seul moyen que l'on a de faire passer un message en Tunisie est de se suicider. Les gens doivent se tuer pour se libérer de Ben Ali et de sa bande!, s'insurge une manifestante. Nous demandons à Ben Ali de quitter le pays et nous lui pardonnerons s'il laisse le pouvoir à ceux qui le méritent. En attendant, nous manifesterons jusqu'à ce qu'il y ait un changement», ajoute un autre manifestant. Le chômage, la cherté de la vie et le sentiment d'être laissés pour compte sont à l'origine d'une récente flambée de mécontentement dans le centre-ouest de la Tunisie, selon des sources syndicales qui ajoutent qu'aucune force politique n'est derrière ces manifestations dites spontanées. Sur le plan de la couverture médiatique, la presse tunisienne continue à faire l'impasse sur ces évènements. Aucune information sur les événements de Sidi Bouzid n'a été diffusée. La chaîne d'informations qatarie Al Jazira qui s'intéresse de plus en plus à ces évènements a été accusée, hier, par les parlementaires tunisiens, d'organe de «manipulation et de diffamation» visant à déstabiliser la Tunisie. Selon des sites tunisiens, les quatre principaux responsables de la commune de Sidi Bouzid ont été arrêtés pour ne pas avoir écouté les jeunes qui se sont suicidés à cause du manque d'emploi.