Tandis que le peuple tunisien refuse toujours de reconnaître le nouveau pouvoir, des négociations ont été ouvertes pour créer un «comité des sages» appelé à remplacer ou à superviser le gouvernement de transition contesté par la rue et «protéger la révolution» ; selon Sihem Bensedrine, figure de l'opposition sous l'ancien régime, de retour à Tunis, cette instance pourrait comprendre des responsables politiques, des représentants de la société civile, des avocats et des responsables syndicaux. «Nous négocions avec le gouvernement de transition. Nous avons des contacts avec certains ministres du nouveau gouvernement ainsi qu'avec le chef de la commission pour la réforme politique», a indiqué Bensedrine, faisant allusion à une instance mise en place par le gouvernement pour réviser les lois. «L'idée est de créer une sorte de conseil pour la protection de la révolution», a-t-elle ajouté. Il lui reviendrait la tâche de rédiger un nouveau code électoral et d'organiser l'élection d'une assemblée constituante. Selon elle, le Parlement aux ordres du président déchu sera dissous et le conseil aura pour mission de superviser le gouvernement de transition dont Mohamed Ghannouchi, dernier Premier ministre de Ben Ali, pourrait garder la direction. Une aide exceptionnelle pour les régions rurales Dans ce contexte, le gouvernement de transition a annoncé le versement d'une aide exceptionnelle de 260 millions d'euros pour les régions rurales les plus pauvres du pays, d'où sont parties les contestations. Une enveloppe qui permettra le financement d'infrastructures, le remboursement des commerçants pillés pendant la révolte et le dédommagement des familles des victimes de la répression. Ouverture d'une enquête préliminaire à Paris contre le clan Ben Ali Le parquet de Paris a annoncé lundi avoir ouvert une enquête préliminaire sur les biens en France de l'ex-président de Tunisie Ben Ali et de son entourage à la suite d'une plainte de trois organisations non gouvernementales. Sherpa, Transparency International et la Commission arabe des droits humains ont récemment déposé une plainte pour corruption, détournement de fonds publics, abus de biens sociaux, abus de confiance et blanchiment aggravé commis en bande organisée. Cette enquête, ouverte à la suite de cette plainte et d'éléments transmis par la police, a été confiée à l'Office central pour la répression de la grande délinquance financière (OCRGDF) et à la cellule anti-blanchiment du ministère de l'Economie. Remaniement ministériel imminent Le porte-parole du gouvernement de transition, Taieb Baccouch, a annoncé lundi soir qu'un remaniement est imminent. Des milliers de manifestants ont encore exigé hier le départ des caciques du régime Ben Ali. Cependant, M. Baccouch, qui est aussi ministre de l'Education, s'est prononcé «à titre personnel» pour le maintien des ministres qui ont servi sous Ben Ali au nom de «la continuité de l'Etat». «Il ne faut pas oublier qu'il y a des postes non pourvus», a-t-il déclaré, rappelant que cinq ministres ont démissionné la semaine dernière. «Peut-être qu'il va y avoir de nouvelles démissions. Donc il y aura un minimum de six, sinon plus, postes à pourvoir, et cela va nécessiter forcément un remaniement ministériel d'ici peut-être demain», a ajouté le porte-parole. Appel à la «grève générale» à Sfax La section régionale de l'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT) de Sfax, deuxième ville du pays, a appelé hier à une «grève générale» pour aujourd'hui pour la dissolution du gouvernement de transition dominé par des caciques de l'ancien régime de Ben Ali. «L'Union régionale appelle à une grève générale dans la province de Sfax pour soutenir les revendications du peuple, qui demande la démission du gouvernement et la dissolution du Rassemblement constitutionnel démocratique» (RCD, ex-parti au pouvoir), selon un communiqué. Tous les adhérents sont appelés à se rassembler devant le siège de la section de Sfax de l'UGTT) pour participer à une manifestation. L'union de Sfax a toutefois demandé d'assurer un «service minimum» dans les secteurs essentiels pour la vie de la population (eau, électricité, hôpitaux...).