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«Avec la chute de Moubarak, la politique au Proche-Orient va totalement changer»
Professeur Chems Eddine Chitour au Temps d'Algérie :
Publié dans Le Temps d'Algérie le 12 - 02 - 2011

Où est passée l'Union pour la Méditerranée (UPM) ? Comment se fait-il que les Etats-Unis d'Amérique et la France tiennent des discours confus sur la situation en Egypte ? Quel sera l'impact de la révolution du peuple égyptien sur la Palestine ? La révolution du pays de Nasser sera-t-elle le prélude du renouveau du monde arabe ? Ce sont, entre autres, les questions abordées dans cet entretien avec le professeur Chems Eddine Chitour.
Professeur à l'Ecole polytechnique d'Alger, il est auteur de nombreux articles sur l'Islam, la laïcité, le voile, et de plusieurs ouvrages, dont L'Islam et l'Occident chrétien : pour une quête de la tolérance et L'Histoire religieuse de l'Algérie.
Le Temps d'Algérie : Avec le départ de Hosni Moubarak après celui de Zine El Abidine Ben Ali, deux alliés fidèles du président français Nicolas Sarkozy, quel sera l'avenir de l'Union pour la Méditerranée ?
Chems Eddine Chitour : Le projet de l'Union pour la Méditerranée n'a jamais été solide. Ces dernières années, il a été moribond. Et maintenant, avec le départ de Ben Ali et de Moubarak, on peut dire que l'acte de décès de cette organisation est signé. Le maillon principal de l'UPM était en réalité l'Algérie, mais elle n'a pas voulu de ce projet. La stratégie de Nicolas Sarkozy était de forcer les pays arabes à accepter Israël dans ce regroupement.
L'UPM n'a pas été soutenue également par l'Allemagne, qui a été associée dans le tas. L'Allemagne avait dit non, parce qu'elle ne veut pas voir la France se retrouver dans son ancien empire colonial.
C'est d'ailleurs la raison qui a conduit au changement de la dénomination de l'union en intégrant toute l'Europe, sachant que l'UPM n'a pas été sa principale préoccupation.
C'était plutôt la préoccupation de la France pour des raisons stratégiques, notamment celui de faire accepter Israël parmi les pays arabes, et ce, en contrepartie de quelques miettes. Israël serait de cette façon gagnant et pourra perdurer, d'où la décision de l'Algérie de ne pas accepter l'adhésion de ce pays. Il faut savoir que le secrétaire général de l'UPM a démissionné récemment.
Il avait quitté son poste parce qu'il n'avait pas les coudées franches et peut-être il a été sous pression afin d'accepter certaines choses contradictoires à ses principes.
Les pays de l'Occident, notamment les Etats-Unis d'Amérique et la France, donnent l'impression à travers leurs déclarations contradictoires d'être choqués par la force du peuple égyptien qui a chassé un dictateur qui régnait pendant 30 ans...
Il faut admettre qu'il existe un acteur majeur dans la région du Proche-Orient, qui est les Etats-Unis d'Amérique. Il a évidemment des alliés, notamment les pays de l'Europe. L'Allemagne, qui a réagi après la chute de Moubarak, avait appelé au respect du traité de paix signé avec Israël. Il se trouve que ce traité avec Israël ne fait pas le bonheur du peuple égyptien,
surtout lorsqu'il voit que ce petit pays est le plus fort dans la région du Moyen-Orient. Quant à la position de la France, elle reste faible par rapport à celle des Etats-Unis. Elle accorde une aide annuelle de 100 millions d'euros à l'Etat égyptien, alors que les USA octroient 3 milliards de dollars. Ils vont donc tenter de s'ingérer dans les affaires internes de ce pays étant donné sa position géostratégique dans la région.
Peut-on s'attendre, après la révolution égyptienne, à des changements dans la région du Proche-Orient, notamment en ce qui concerne l'avenir de la question pasteurienne et de l'accord de paix signé avec l'Etat sioniste ?
La politique au Moyen-Orient va totalement changer. Pour la première fois, s'il n'y a pas d'ingérence dans les affaires internes des Egyptiens. Les peuples arabes auront la possibilité de montrer qu'ils sont mûrs pour la démocratie. Le gros problème des pays de l'Occident est celui d'essayer de formater les opinions par la question du poids du parti des Frères musulmans.
Mais ce qui les intéresse, ce n'est pas l'avenir des Egyptiens et des pays musulmans, mais l'avenir d'Israël. Il y a trois jours de cela, le ministre de la Défense israélien, Ehud Barak, est parti aux Etats-Unis d'Amérique pour demander de nouvelles armes afin d'éviter d'être pris de court par la guerre arabe, à l'instar de celle 1973. Les Israéliens s'attendent à une nouvelle guerre avec les pays arabes. Le chef d'état-major d'Israël, Benny Gantz, a estimé d'ailleurs que la stabilité du régime Moubarak est préférable à la démocratie arrachée par le peuple égyptien. C'est terrible de tenir un tel discours devant l'ampleur de la révolution égyptienne.
Ce qui veut dire aussi qu'Israël ne veut pas qu'il y ait de démocratie dans les pays du Moyen-Orient. Ils ont besoin de régimes forts capables de mater leurs peuples et rester des soldats fidèles aux pays de l'Occident. Pour les Américains et les Israéliens, le départ de Moubarak est une grande perte. Mais, pour les Palestiniens, la révolution du peuple égyptien reste une chance unique de revenir et d'arracher leur liberté.
Je n'évoque pas ici le président Mahmoud Abbas et son gouvernement, qui se situent dans le même camp que celui de Moubarak. Israël, qui craint justement la remontée du nationalisme et du patriotisme arabes, va certainement l'amener à respecter la résolution 242 de l'Organisation des nations unies. Dans ce contexte, les Etats-Unis d'Amérique vont tenter de réorganiser la situation au Moyen-Orient, étant donné l'impasse actuelle.
Nous constatons à ce propos que la démocratie dans les pays du Proche-Orient va aider à la résolution de la situation des Palestiniens. Tous les territoires des pays arabes occupés par Israël doivent être restitués et les colonies sauvages construites en Cisjordanie doivent être également démantelées. El Qods doit être coupée en deux parties, comme elle l'était auparavant (ouest et est). Tout ce qui a été construit dans la partie est doit être aussi démantelé.
Il y aussi la question du retour des réfugiés palestiniens. Sans oublier la destruction du mur construit par le régime de Moubarak sur les frontières égypto-palestiniennes, dans la bande Ghaza. Le président américain Obama dispose cette fois-ci d'une chance inouïe pour participer à la résolution du conflit israélien.
Quel sera le rôle du parti des Frères musulmans en Egypte ?
Justement, les pays de l'Occident doivent cesser de diaboliser l'Islam et le parti des Frères musulmans. En réalité, les régimes occidentaux s'accommodent très bien avec d'autres religieux, tels que les partis chrétiens et fanatiques.
Ce qui est inquiétant, c'est les ingérences dans les affaires internes des pays. Pour le cas de l'Egypte, il ne faut pas oublier que le maréchal Tantaoui, qui dirige actuellement le Conseil suprême des forces armées, institution à laquelle Hosni Moubarak a confié le pouvoir, avait dirigé les troupes égyptiennes contre le président Saddam Hussein et le peuple irakien en 1991. Les Israéliens ne veulent pas qu'il y ait des élections rapides et libres en Egypte.
Pourquoi ? Ils sont conscients que le seul parti politique organisé et structuré capable de prendre le pouvoir est celui du parti des Frères musulmans. Il se trouve que ce parti politique a une autre position sur le traité de paix signé avec Israël. L'Occident va essayer avec tous les moyens possibles de faire émerger une force politique qui sera fidèle à ses intérêts et pour voler cette révolution du peuple égyptien.
Comment voyez-vous l'évolution du dossier palestinien, avec la chute du régime de Moubarak ?
Le gros problème de la Palestine, ce sont ses dirigeants. Abou Mazen est un Moubarak bis. Il n'a rien fait pour la cause palestinienne. Plus grave encore, il s'est compromis avec les forces israéliennes en cédant sur des questions stratégiques. Les câbles de WikiLeaks ont révélé quelque-unes. Le président palestinien était d'accord pour le non-retour des réfugiés.
Il était également partant pour abandonner la partie est d'El Qods, alors que les Palestiniens ne demandent qu'à vivre sur leur territoire. J'espère que cet électrochoc égyptien va donner à réfléchir aux régimes de l'Occident de manière à trouver des possibilités d'influer sur Israël. Car les peuples des pays arabes ont le droit à la dignité et à se prendre en charge par eux-mêmes. Et si les pays arabes sont plus solidaires, ils peuvent régler la question pasteurienne. Ce qui va donner une nouvelle visibilité.
Quel sera l'effet de la révolution égyptienne sur les autres pays alliés des Etats-Unis d'Amérique, notamment l'Arabie Saoudite, la Jordanie et l'Irak ?
C'est un gros problème et un souci surtout pour ces trois pays. Ils sont en train de prendre les extincteurs pour éteindre le feu. Les pays occidentaux demandent à tous les régimes dictatoriaux de procéder à des réformes urgentes. C'est le cas surtout de la Jordanie et peut-être demain en Arabie Saoudite. L'Irak est concerné aussi.
Le feu de la révolte peut s'étendre à d'autres pays arabes de la région. Nous constatons que tous les scénarios concoctés par l'Occident, qui consistent à dire que rien de bien ne peut venir des peuples des pays du monde arabe et qu'il faudrait les tenir en tutelle, sont en train de voler en éclats.
Toutes les certitudes occidentales sont en train d'être battues en brèche par une population jeune qui n'est pas formatée, et compromises comme la plupart des élites politiques, à l'exception évidemment des Frères musulmans qui ont souffert sous le règne de Moubarak. Pour prendre de la vitesse, les Américains sont en train de conforter le maréchal Tantaoui. L'armée égyptienne possède un pouvoir économique très important. Elle est considérée comme un garant de la stabilité demandée par l'Occident.
C'est pour cela que le peuple égyptien demande à l'armée de se retirer de la vie politique. Le peuple veut constituer une coordination où l'armée serait juste un segment. Ce qui n'est pas encore acquis. L'Occident va tenter de peser sur le cours des évènements en restant très proche de la révolution. Dans ces conditions, j'espère qu'il y ait un renouveau du monde arabe pour contrecarrer ces manœuvres.


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