«Halte à la dégradation des diplômes d'ingénieur.» Ce sont les mots inscrits sur une banderole accrochée à l'entrée de l'université des sciences et des technologies Houari Boumediene (USTHB) de Bab Ezzouar, où les étudiants continuent d'observer un bras de fer inédit avec leur tutelle. Cette protestation, due, rappelons-le, à la mise en vigueur du décret présidentiel 10-315 qui définit la nouvelle classification des diplômes d'enseignement supérieur, continue de faire des remous au sein des universités. C'est ainsi que le plus grand pôle universitaire de l'Algérois était complètement paralysé à l'entame de la deuxième semaine de protestation. A l'intérieur de l'université, les étudiants allaient et venaient. Aucun cours n'a été dispensé. Quelques délégués de départements que nous avons rencontrés sur place nous ont déclaré qu'ils maintiendront leur mouvement jusqu'à satisfaction de leurs revendications, après abrogation du décret de la discorde. Interpellés sur les actions qu'ils envisagent d'entreprendre afin de mieux canaliser leur mouvement, quelques étudiants diront qu'ils n'arrivent pas à se mettre d'accord avec leurs camarades sur les procédés à employer afin de se faire entendre. Mais d'autres étudiants pensent que le mouvement est voué à l'échec, ne serait-ce que compte tenu du fait qu'il n'est pas bien organisé. Par ailleurs, deux étudiants en fin de cycle doctoral dénoncent la manière dont est menée cette grève qui «ne paralyse pas seulement les cours, mais nous empêche de faire nos recherches puisque tous les laboratoires ont été fermés». Un enseignant de physique rencontré sur place vient confirmer cette thèse en déclarant que «certes la revendication est justifiée, mais ce mouvement anarchique n'est pas conforme. Derrière tout cela on trouve des meneurs qui sont ici à l'université à passer et repasser les années sans pour autant arriver à décrocher leur diplôme, et ceux-ci ne peuvent en aucun cas résoudre les problèmes des universitaires». «L'Algérie est le seul pays qui permet à ses étudiants de quadrupler l'année», ajoutera notre interlocuteur. «On ne cédera jamais,on veut un écrit noir sur blanc» Les délégués des départements répondront par la négative en expliquant que leur mouvement n'est pas l'apanage de quelconques politiques ou mouvement. «Ce sont nos diplômes qui sont pris en otages par ce décret qui déclasse l'ingénieur». Même climat dans les grandes écoles gagnées par cette grève qui a démarré, rappelons-le, à l'Ecole supérieure d'informatique (ESI) avant de s'étendre à huit autres grandes écoles de l'Algérois, entre autres l'ENTP, Polytech, l'Ecole d'architecture, l'INA… C'est ainsi que les étudiants de ces écoles, qui ont observé un sit-in «infructueux» ce mercredi devant le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, disent que leur «mouvement sera maintenu jusqu'à entière satisfaction de nos revendications». Saïd Lembrouk étudiant à l'école polytechnique martèle : «Nous n'allons jamais céder. Nous n'abandonnerons notre mouvement qu'à une seule condition : un écrit officiel qui mettra en valeur le statut de l'ingénieur classé à la catégorie 14 au lieu de la 13, et la redéfinition du droit d'accès aux études doctorales, tout en abrogeant à l'occasion le décret 10-315.»