Alors que le boulanger d'Abidjan attend son heure, le boucher de Tripoli pousse son délire à ses extrêmes limites. Terré dans sa forteresse, le roi génocidaire tiendra le crachoir durant une heure et vingt-deux minutes. L'ancien Guide la Jamahiriya, qui ne se considère pas comme président sinon il aurait jeté sa démission à la figure des Libyens, est fou furieux contre les «rats de Benghazi». De sa main de fer, qui se ramollit d'heure en heure, Kadhafi a promis de les brûler vif. Une purification programmée que ses quelque 30 000 mercenaires devraient se hâter à mener avec tout leur savoir-faire barbare. Puisque, à s'en tenir aux dires du boucher solitaire, la force n'a pas encore été employée. C'est vrai que 1000 cadavres ne valent rien en nombre devant les 40 000 liquidations physiques que son régime a commis une quarantaine d'années durant. Moi ou la terre brûlée, n'a pas cessé de répéter le Guide qui a perdu les quatre points cardinaux. La Libye n'appartiendrait pas aux Libyens mais au seul leader révolutionnaire dont la légitimité historique devrait le suivre jusqu'au fond de sa tombe. Et dans la mesure du possible la léguer à ses fils dont l'un d'eux voudrait, lui aussi, posséder sa propre caserne et sa propre milice comme s'il s'agissait d'un jeu de Lego au montage facile. Les Kadhafi seraient disposés à tout brader, mais pas leur droit sur la vie et sur la mort de leurs sujets. S'il devait y avoir demain des rivières pourpres de sang, le colonel voudrait avoir le privilège de les remplir de ses mains et l'exclusivité afin de pouvoir achever son plan génocidaire contre ceux qui voudraient créer un nouvel Afghanistan en Méditerranée. De derrière la porte mille fois blindée d'El Azizia, le boucher de Tripoli a juré de résister jusqu'à ce que son corps soit vidé de la dernière goutte de sang. Résister contre qui ? Derrière les «rats de Benghazi» se tiendraient des forces régionales et des forces occidentales qui partageraient le vœu de voir sa tête au fond d'un sac. L'infréquentable Guide, avec ou sans boussole, en veut particulièrement au Qatar qui aurait mieux fait de taire les crimes du frère Mouammar. Tout comme toutes ces puissances de l'Ouest qui se pressaient de lui dérouler le tapis rouge, en contrepartie d'un arrosage sans interruption à l'or noir. Mais force est de reconnaître qu'il n'est pas possible d'acheter le silence complice éternellement, même avec des échanges commerciaux américano-libyens qui ont atteint près de cinq milliards de dollars l'an dernier. Peut-il en vouloir à ce point à ces étrangers renégats alors que les plus fidèles de son clan, chefs militaires, ministres, diplomates…, le lâchent à tour de rôle ? Un dictateur est fait pour finir seul. Et ce ne sont pas les 30 000 mercenaires qui pourront y changer quelque chose. Face aux pressions des puissances occidentales qui montent en cadence, les alliés de Kadhafi n'auraient pas pu défendre sa cause au dernier Conseil de sécurité à huis clos, il n'y aurait plus grand-chose à faire. Surtout quand des navires de guerre convergent vers le large de la Libye, officiellement pour sécuriser les évacuations des ressortissants étrangers ou parer à toute immigration illégale qu'El Cavaliere redoute particulièrement. Mais pour bon nombre d'experts militaires, la présence de frégates, de destroyers, de navires d'écoute et de soutien n'est pas fortuite. Il s'agirait bien d'un pré-positionnement de moyens ou, du moins, d'un «show of force». Est-ce pour autant le début de la fin du leader libyen qui, à la fin de son discours fleuve, n'a pu forcer que des dizaines de ses partisans à venir crier, sur la place verte, leur admiration au boucher de Tripoli. Il passerait ses derniers jours à rédiger son testament vert, les Alliés doivent bien cela au silencieux Obama.