Le régime libyen tentait hier de reprendre la main et affirmait avoir repris plusieurs villes. La télévision d'Etat libyenne a annoncé que des forces fidèles au colonel Kadhafi étaient en route vers Benghazi, fief de l'opposition, à près de 1000 km à l'est de Tripoli. L'armée libyenne avait déjà tenté ces derniers jours de lancer une contre-offensive pour stopper la progression des insurgés, bombardant Ajdabiya et Brega. Malgré de violents combats mercredi dans le port pétrolier de Brega, l'insurrection et des militaires ralliés à l'opposition ont avancé jusqu'à la ville pétrolière de Ras Lanouf, à 300 km au sud-ouest de Benghazi. La télévision d'Etat a affirmé hier que le gouvernement avait repris le contrôle de Ras Lanouf, de Tobrouk (est) et de Misrata (ouest). Mais les insurgés ont immédiatement contesté la reprise des trois premières villes. Selon des journalistes sur place et les insurgés, Ras Lanouf était ainsi toujours contrôlée hier par ces derniers. Dans la matinée, les forces pro-régime ont cependant mené deux raids, sur un camp de rebelles et sur un poste de contrôle, sans faire de blessés, selon les premières informations. En revanche, des combats ont forcé les insurgés à se retirer de Ben Jawad, à une centaine de kilomètres à l'est de Syrte et à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Ras Lanouf, où ils ont annoncé vouloir fixer leur «ligne de défense». Selon un médecin, les combats hier à Ben Jawad ont fait deux morts et une trentaine de blessés. Des tirs d'artillerie soutenus étaient en cours près de cette bourgade, hier soir. Les insurgés libyens ont également contesté la reprise de Tobrouk. «Ce n'est pas vrai. La région allant d'Ajdabiya à la frontière égyptienne est sous notre contrôle», a déclaré Fateh Faraj, un membre du conseil des insurgés à Tobrouk. A Misrata, troisième ville du pays à 150 km à l'est de Tripoli, un habitant et un insurgé ont déclaré que la ville était contrôlée par l'insurrection mais qu'une offensive gouvernementale à l'arme lourde était en cours. «Les chars tirent des obus sur le centre-ville, près du siège de la radio. Nous entendons aussi des tirs nourris d'armes automatiques», a expliqué un habitant. «Les habitants n'ont pas d'armes. Si la communauté internationale n'intervient pas rapidement, ce sera le carnage», a-t-il ajouté. A Tripoli, le régime a orchestré une manifestation de soutien au colonel Kadhafi pour célébrer la «victoire». Soldats, policiers et miliciens ont tiré en l'air en signe de joie. «Nous avons gagné, Al Qaïda est parti», a déclaré un soldat. Sur la place Verte, dans le centre, 4000 à 5000 partisans de Kadhafi se sont rassemblés pour une manifestation «spontanée». Sur le plan politique, les insurgés continuaient de s'organiser. Le Conseil national, créé le 27 février par l'insurrection, s'est réuni pour la première fois et s'est déclaré «le seul représentant de la Libye». Hier, la France a salué la création de ce Conseil national et apporté «son soutien aux principes qui l'animent et aux objectifs qu'il s'assigne». Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a cependant estimé qu'une intervention militaire aurait des «effets négatifs» et s'est prononcé en faveur d'une zone d'interdiction aérienne pour empêcher les bombardements.