C'est lors d'un sit-in tenu devant le ministère de la Justice par plusieurs dizaines d'employés et de cadres de la justice que le collectif a apporté un amendement final à une plateforme de revendications contenant 12 points distincts adressée à la tutelle. Quatre de ces points concernent la fonction publique et les huit autres sont destinés à l'administration judiciaire. Ils étaient plusieurs dizaines de personnes exerçant au sein de 36 juridictions (cours), 40 instances, 200 tribunaux et autres administrations centrales réparties sur le territoire national, à se regrouper devant le siège du ministère de la Justice pour exprimer leur ras-le-bol et exiger «plus de considération de la part de la tutelle». Les 12 points inscrits sur la plateforme sont de nature socioprofessionnelle et sont liés aux conditions de travail mais également aux rémunérations. Parmi les quatre revendications concernant la fonction publique, les protestataires exigent l'application de la prime de souveraineté (50 000 DA par trimestre) non appliquée par l'administration centrale depuis 1990, date de publication de cette disposition. Les protestataires dénoncent la disparité des salaires des personnels et dont la plupart sont, selon eux, «en deçà de la mission qui leur est confiée». Durant le sit-in, les délégués ont fait une lecture de la plateforme avant d'être reçus par le ministre. «Nous lancerons une grève nationale illimitée si les revendications ne sont pas satisfaites», menacent-ils avant de se diriger vers l'entrée du ministère, quadrillée par les agents. «L'administration centrale devrait accorder plus de considération au personnel qui constitue la cheville ouvrière dans le système judiciaire, plutôt que d'être regardante qu'en direction des magistrats qui perçoivent des salaires mirobolants», lance un ingénieur d'Etat, qui a indique que «la plupart des cadres de ma catégorie ne perçoivent qu'un salaire situé entre 23 000 et 30 000 DA». La revalorisation des salaires, la transparence dans l'attribution des postes, le droit à l'accès aux promotions et la mise à niveau des salaires constituent un infime partie des revendications émises par les protestants. Il est à souligner que le mouvement de protestation qui couvait depuis des lustres a pris forme et a été déclenché d'une manière spontanée suite à l'attribution de rappels considérables aux greffiers, lesquels ont perçu des sommes oscillant entre 50 et 140 millions de centimes. Le sit-in était marqué par une très mauvaise organisation. Et pour cause, le secteur n'est pas doté d'un syndicat à même de coordonner et fédérer les protestataires autour d'une démarche unie. Pour l'heure, les 36 représentants de différentes juridictions devaient être reçus au ministère de la Justice pour débattre les revendications contenues dans la plateforme. D. Mentouri Boulahia Mourad, ingénieur et administrateur du Centre national du casier judiciaire : «J'exerce au sein de ce centre virtuel et suis marginalisé au même titre que mes collègues»«Nos salaires sont médiocres et non équivalents au volume de travail qui nous est demandé», lance ce cadre activant au sein du centre qui, selon lui, «n'a pas de statut particulier depuis 2004, date de son inauguration par le ministre de la Justice, garde des Sceaux». Il dénonce le mépris et le manque de considération vis-à-vis des cadre de sa catégorie de même que tous les autres employés, en indiquant : «En l'absence de statut particulier, nous sommes catégorisés comme faisant partie du corps commun, et en guise de salaire, nous percevons 30 000 DA.» A propos des postes de travail et des promotions, ce dernier affirme que «les postes sont accordés selon des critères autres que professionnels», ajoutant pour justifier sa colère : «Nous produisons pas moins de 500 casiers judiciaires par jour (B2 et B3 respectivement demandés par les institutions, police... et par les citoyens) pour le compte des juridictions ainsi que pour les consulats et autres ambassades.» Il ne nie pas les investissements engagés par la tutelle concernant les équipements modernes mais déplore «le manque de prise en charge en matière de ressources humaines», en lançant : «Nous sommes marginalisés lorsqu'on constate qu'un commis greffier (recruté avec un niveau de terminale) perçoit un salaire supérieur à celui d'un ingénieur d'Etat.» Bendjelloul Bachir, technicien supérieur au tribunal de Relizane :«J'exige d'être écouté et considéré» Ce technicien supérieur avoue, sur un ton de révolte, «le rôle polyvalent qu'il joue au sein du tribunal de Relizane», indiquant qu'«en contrepartie de la bonne foi et du sacrifice que je consent, à l'instar de mes autres collègues, on nous concède un salaire de 23 000 DA», ajoutant que des employés ne possédant pas sa qualité perçoivent des salaires supérieurs au sien. Les conditions de travail dans lesquelles il exerce sont déplorable et il n'hésite pas de les dénoncer. «Je ne possède pas de bureau et nous sommes quatre à évoluer dans un espace restreint», dira ce dernier, qui évoque l'atmosphère pesante et le stress qui en découle. «J'ai été victime d'un accident de travail, et le bras dans le plâtre, j'ai été contraint de travailler et aucune contrepartie légale ne m'a été concédée», indique ce dernier, qui relève avec force «ne pas bénéficier d'avancement, encore moins de promotion ou autres avancements, ne serait-ce que d'un échelon.» «Nous exigeons un traitement honorable à la hauteur de la noble tâche que nous assumons.»