Au moment où Bachar Al Assad s'apprête à annoncer d'importantes décisions, probablement le limogeage de son gouvernement avec le maintien des vieux amis de papa, Mme Hillary Clinton a mis les points sur les «i». Il ne faut pas s'attendre à une intervention en Syrie, calquée sur le modèle libyen. Première raison majeure, Al Assad fils n'a pas commis jusque-là de massacres à grande échelle. Puis, il se pourrait que le jeune chef d'Etat ait eu de bonnes intentions en ce qui concerne le lancement de réformes politiques et qu'il n'ait pas pu lever toutes les barrières dressées par les caciques du parti Baath. Pourtant, les pour et les contre vont devoir s'y adapter sans froncer le sourcil. Certes, le Département d'Etat US a exclu toute intervention militaire au-dessus de la Syrie, le pays n'est pas assez riche pour pouvoir rembourser demain ses futurs libérateurs, mais il est tout de même impératif de passer à la vitesse supérieure en matière de libéralisation. Conseil du Premier ministre turc qui a pris son téléphone pour inviter Bachar Al Assad à entamer sans trop attendre de réelles réformes politico-sociales. De toute façon, avec ou sans la guerre, le changement est inéluctable, appuyait le président Obama. Mieux vaut donc passer à l'action, au risque de se retrouver à la place, peu enviable, du Yéménite Ali Saleh qui doit se mordre les doigts, son propre gendre a fini par regagner les rangs de l'opposition. Ou à la place de Hosni Moubarak qui a été placé en résidence surveillée en compagnie des membres de sa famille. En attendant un procès devant la justice égyptienne ? Rien n'a filtré à ce propos. C'est parce qu'il a encore une chance d'échapper à ce triste sort que le jeune Al Assad a été presque prié par l'influent Reccep Teyyip Erdogan de franchir le Rubicon démocratique. Le voisin turc, qui partage avec la Syrie le souci majeur de l'indépendantisme kurde, n'aimerait pas envoyer ses émissaires au Royaume-Uni pour parler de l'ère post- Bachar Al Assad. Ni proposer la médiation d'Ankara qui est en train de faire son bonhomme de chemin à Londres parmi d'autres initiatives politiques «rivales». Mouammar Kadhafi peut toujours comparer l'«intervention barbare» en Libye aux invasions nazies, sa légitimité ne fait plus de lui un interlocuteur redevenu fréquentable pour un temps. Même Moscou a reconnu la mort politique de l'actuel régime libyen pour lequel les Occidentaux prédisent une implosion prochaine, Washington ne mettra pas la main dans le guêpier libyen. Avant qu'il ne soit trop tard, les proches de Kadhafi (militaires et politiques) ont été sommés par les présidents Sarkozy et Cameron de choisir leur camp. S'ils s'obstinent à l'accompagner jusqu'au bout de sa folie meurtrière, ils auront eux aussi à rendre des comptes. L'heure est venue pour qu'ils coopèrent à la destitution de leur chef dont la fin fait déjà craindre le pire ailleurs. A Caracas, où le président Hugo Chavez redoute d'être la prochaine cible des «impérialistes US». Le risque zéro n'existe pas et rien ne dit que le vent des révoltes arabes ne va pas secouer les cocotiers, annonçant l'avènement du «printemps latino» et la fin des nationalisations des hydrocarbures dont l'Amérique et ses alliés doivent lorgner sans relâche la libéralisation. En Libye, elle est déjà en marche. Le Qatar, allié fidèle de l'Occident, a même été désigné pour commencer à vendre et bientôt à exporter l'or noir libyen via les ports pétroliers aux mains de l'opposition. Le néo-socialisme arabe serait-il à ce point à la dérive pour que le Bolivarien Chavez tire la sonnette d'alarme ? A l'heure du partage des richesses entre grandes puissances ultralibérales et leurs alliés, il est difficile, voire impossible, de faire avancer de vieilles thèses désuètes mille fois liftées. Que restera-t-il à l'indésirable Mouammar Kadhafi après ce premier RDV londonien ? Au mieux l'exil, au pire le cercueil ? Il ne serait pas la dernière victime collatérale des nouvelles «croisades».