Tout a commencé hier quand une violente explosion a secoué hier Adjedabia, dans l'est de la Libye, sans doute suite à une frappe aérienne de l'Otan. Quelques heures plus tôt, l'ouest d'Adjedabia avait été bombardé par les forces fidèles au dirigeant Mouammar Kadhafi, entraînant la fuite des opposants. Ces tirs d'artillerie constituaient un nouveau revers pour les opposants qui avaient progressé hier matin de plusieurs dizaines de kilomètres vers l'ouest en direction du site pétrolier de Brega mais ont dû battre en retraite. Des dizaines de voitures fuyaient la ville d'Adjedabia en direction du fief rebelle de Benghazi. Pourtant, c'était la première fois depuis mercredi dernier que les chefs de l'opposition ont autorisé des journalistes à sortir d'Adjedabia et à se rapprocher du front sur la route reliant les deux villes, distantes d'environ 80 km. Jeudi et vendredi, les tirs d'obus de l'armée régulière avaient déjà provoqué des mouvements de panique parmi les rebelles, forcés de se replier vers la ville d'Adjedabia, quasiment désertée par ses habitants. Aussi bien sur ce front que sur celui de l'Ouest, l'Alliance internationale continue d'essuyer des critiques. Elle est accusée de ne pas «remplir sa mission de protéger les civils», selon un porte-parole des rebelles. Il a toutefois reconnu que «les avions de l'Otan ont détruit totalement les casernes et les bataillons de Kadhafi autour de la ville». Les frappes aériennes atteignent-elles leurs limites dans un conflit où les cibles sont difficiles à identifier ? Trois semaines après le début des frappes, force est de constater que la campagne militaire lancée contre Kadhafi montre ses limites. Depuis plusieurs jours, l'intensité des frappes a baissé au-dessus de la Libye. Le fait que les forces loyales au régime aient déplacé leurs chars et leurs soldats au milieu des villes empêche souvent les avions de chasse de l'Otan, qui redoute plus que tout des dégâts collatéraux, de frapper. En retirant leurs avions de combat de la mission au début de la semaine, les Américains auraient aussi emporté avec eux une partie de leurs systèmes de renseignements et d'observation, qui permettaient aux pilotes français et britanniques d'atteindre une plus grande précision. Le général américain Carter Ham, commandant des forces américaines pour l'Afrique, a jugé «peu probable» que les opposants puissent un jour donner l'assaut à Tripoli et renverser Kadhafi seuls. Faut-il dès lors envisager le recours à des troupes au sol ? «Il est possible qu'une telle éventualité soit envisagée», a reconnu le général Ham, même si personne n'en veut vraiment. Deuxième option, armer et encadrer les rebelles libyens, sur laquelle tout le monde n'est pas d'accord. Reste la solution politique difficile à obtenir. A trois jours d'une réunion du Groupe de contact sur la Libye dans la capitale libyenne, un groupe de dirigeants africains – le président sud-africain Jacob Zuma et ses homologues du Congo, du Mali, de Mauritanie et d'Ouganda – était attendu hier en Libye. Objectif affiché de ce «panel» de médiateurs de l'Union africaine (UA) : rencontrer Kadhafi puis des responsables de l'insurrection pour tenter d'obtenir un cessez-le-feu. A la veille de leur arrivée, l'opposition a par avance rejeté toute idée d'un cessez-le-feu impliquant le maintien au pouvoir de Mouammar Kadhafi ou de ses fils. Pour sa part, la Ligue arabe a annoncé hier qu'elle accueillerait le 14 avril au Caire une conférence sur la Libye en présence notamment du secrétaire général de l'ONU et de la cheffe de la diplomatie de l'UE Catherine Ashton. Enfin, les ministres européens des Affaires étrangères ont quant à eux prévu de rencontrer un représentant du Conseil national de transition (CNT), une première pour l'UE dans son ensemble. L'UE se prépare en outre à lancer une mission militaro-humanitaire pour aider la population assiégée de Misrata. L'Allemagne s'est déjà dite prête à participer à cette mission, qui doit encore être acceptée par l'ONU. Hier, un navire affrété par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a accosté à Misrata, avec à son bord suffisamment de fournitures médicales pour soigner 300 blessés.