Alors que le mouvement prodémocratie marque le pas dans le monde arabe, et que les appels à une aide financière occidentale se multiplient, les institutions financières internationales veulent marquer leur soutien. «Bien sûr, nous nous tenons prêts à aider», a affirmé Dominique Strauss-Kahn. En liant ainsi politique et économique, il se retrouve sur la même longueur d'onde que le patron de la Banque mondiale, Robert Zoellick. «Nous ne devons pas oublier que la révolution tunisienne a commencé par le suicide d'un marchand de fruits harcelé par les autorités», a-t-il plaidé cette semaine à l'ouverture de la réunion semestrielle de la Banque mondiale, promettant d'aider la Tunisie à «restreindre l'application arbitraire des réglementations et des formalités administratives». Samedi à Washington, il a renchéri devant le Comité monétaire et financier international (CMFI), instance de 24 pays chargée de définir les grandes orientations politiques du Fonds monétaire international : «Une aggravation des conditions au Moyen-Orient et en Afrique du Nord pourrait faire dérailler la croissance mondiale.» Selon la Banque mondiale, les révolutions en Tunisie et en Egypte ont amputé la croissance de ces deux pays d'environ trois points en 2011, par rapport à ce qui était prévu il y a trois mois. Le FMI, qui a aussi planché sur la question, a sorti des prévisions guère optimistes : d'après ses projections, les pays arabes importateurs de pétrole devraient afficher en 2011 une croissance autour de 2%, très insuffisante par rapport à leur croissance démographique, dans un contexte de prix de l'énergie et de l'alimentation élevés. Des inquiétudes exprimées au plus haut niveau qui expliquent pourquoi les 187 Etats membres du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale ont chargé samedi les deux institutions de Washington de veiller sur les pays arabes, qui souffrent aujourd'hui des retombées économiques des révoltes populaires. Le CMFI a ainsi recommandé «une attention particulière», pendant que le Comité de développement, qui conseille le FMI et la Banque mondiale, demandait lui aussi à la banque «de renforcer son appui au Moyen-Orient et en Afrique du Nord». «Aujourd'hui, le changement en cours au Moyen-Orient appelle à repenser et réorienter l'engagement de la communauté internationale. Ces transitions concernent au final les gens : accroître leurs chances et leur liberté», a estimé le secrétaire au Trésor américain, Timothy Geithner, dans sa déclaration au CMFI. «Bien sûr nous nous tenons prêts à aider, sur le versant de l'assistance technique, et sur le versant du financement», a affirmé, pour sa part, le directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, lors d'une conférence de presse après la réunion de Washington. Il a insisté sur ce qui est devenu un de ses thèmes favoris des dernières semaines, la nécessité de partager plus équitablement les fruits de la croissance économique. «L'exemple du Moyen-Orient a mis en lumière cette question : le fait que vous pouvez avoir de bons chiffres au niveau de la croissance sans viabilité.»