«Menteuse. N'a pas fait la révolution. Comédienne», tels sont les propos de Yacef Saâdi qui ont soulevé la colère de Mme Louisette Ighil Ahriz, comme elle l'a précisé lors d'une conférence de presse qu'elle a animée hier à Alger. La moudjahida a tenu à retracer devant l'assistance son parcours pendant la révolution et ainsi défier son détracteur devant tout le monde : «Démettez-vous de votre immunité parlementaire… démissionnez et venez m'affronter en justice.» C'est en 1957 à Alger que Mme Ighil Ahriz a rejoint la révolution en compagnie d'une trentaine de jeunes femmes, pour s'engager dans la guérilla urbaine menée par le FLN. A la fois fragiles et cruelles, ces poseuses de bombes sont devenues des figures emblématiques de l'épisode le plus meurtrier de la guerre d'Algérie : «La bataille d'Alger». C'est ainsi que Louisette fut arrêtée un certain 28 octobre 1957 après avoir été grièvement blessée lors d'un accrochage meurtrier. Internée à Barberousse puis à El Harrach, elle fera pas moins de sept établissements pénitenciaires français jusqu'à l'indépendance. Lors de sa conférence, la moudjahida n'a pas omis de souligner l'enfer et l'atrocité qu'elle a vécus pendant son internement, où elle a rencontré son détracteur qu'elle défie d'affronter à tous les niveaux. Elle déclarera qu'«il est regrettable qu'en 2011 nous soyons réduits à des querelles de personnes… plus d'un demi siècle après la révolution… Yacef Saadi à travers des propos insultants et diffamatoires me dénie le droit de moudjahida, a-t-il le droit et l'autorité ?» Lors de son intervention, le moudjahid Basta Arezki trouvera qu'il est vraiment dommage que de tels incidents se produisent. «Je demande à Yacef Saâdi de réparer sa faute en demandant pardon à Mme Ighil Ahriz.» Pour revenir à Louisette et aux «porteuses de feu», comme on les surnommait pendant la révolution, ces jeunes révolutionnaires ont été fichées comme terroristes par les autorités militaires qui les traquaient sans merci. Certaines d'entre elles ont été tuées au cours de leurs missions et d'autres arrêtées et torturées avant d'être jugées et condamnées à la prison à perpétuité ou à la peine de mort. Pour rappel, il y a une semaine Yacef Saâdi s'est emporté contre celles qu'il qualifie de «très bonnes comédiennes», allusion à des pseudo moudjahidate qui prétendent avoir pris part à la révolution. «Ne croyez pas toutes celles qui versent des larmes. Il y a des femmes qui prétendent avoir pris part à la guerre mais ce sont des menteuses qui excellent dans l'art de faire de la comédie. Je veux précisément parler de Louisette Ighil Ahriz qui dit avoir été torturée. Je vous confirme qu'elle n'a aucun rapport avec la guerre de libération», a-t-il dit. Ces propos ont été tenus en marge de la présentation d'un film documentaire intitulé Fidayate. Ce film réalisé par Lamia Gacemi est une succession de témoignages de moudjahidate, dont celui de Louisette Ighil Ahriz. Un témoignage qui n'a pas été du goût de Yacef Saâdi. Ce dernier est allé jusqu'à brandir la menace de retirer à Ighil Ahriz le titre de moudjahida. La réaction de cette dernière ne s'est pas fait attendre. Louisette Ighil Ahriz se défend et menace d'attaquer Yacef Saâdi en justice pour diffamation.