La création du futur Etat palestinien ne semble pas être encore dans l´agenda diplomatique des Etats-Unis et de l´Union européenne, 64 ans après celle de l´Etat d´Israël par le Conseil de sécurité de l´ONU dans les conditions scandaleuses que l´on sait. Entre temps, la millénaire Al Ariha (Jafa en hébreu) dont il ne reste en 2011 que 20 000 des 2 millions d´habitants arabes qu´elle comptait en 1947, est devenue un quartier de Tel Aviv, la nouvelle ville construite pour les les juifs venus depuis cette date de Pologne, d´Allemagne et de Russie. L´idée d´un Etat palestinien a fait son chemin depuis l´invasion de l´Irak en 2003, moins dans les faits et les actes et plus dans les déclarations de bonne intention des dirigeants occidentaux, histoire de calmer l´opinion arabe humiliée par l´histoire de la Palestine trahie. Or, le moment venu, la conjoncture n´est jamais la bonne et les hésitations commencent à se faire plus claires. Récemment, le Congrès américain a ouvertement fait savoir que si le Monde arabe se hasardait à faire voter par l´Assemblée générale l´entrée de la Palestine à l´ONU, comme vient de l´annoncer la Ligue arabe à Doha, les Etats-Unis useraient de leur de droit de veto au Conseil de sécurité pour bloquer cette initiative, même parrainée par un grand nombre d'Etats membres des Nations unies. Les parlementaires américains qui sont dans leur grande majorité membres ou aux mains du lobby sioniste ont rejeté, en son temps, l´idée de Barack Obama d´un retour d´Israël aux frontières de 1967, date de la «Guerre des six jours», pour accélérer la création de l´Etat palestinien. Obama face au lobby juif Pour narguer davantage le premier président noir de souche musulmane de l´histoire de la puissance qui gère le nouvel ordre politique mondial, ces mêmes parlementaires, dont beaucoup sont juifs avant d´être américains, ont donné la parole au Premier ministre israélien. Depuis la tribune du Congrès américain, Benjamin Netanyahu ne s´est pas fait prier pour lancer à son tour un défi en ce sens au président des Etats-Unis. Obama qui est déjà en précampagne pour un second mandat à la Maison Blanche garde le silence parce qu´il sait que le lobby juif détient la clé de la Maison Blanche. Pour avoir fait passer sa réforme de la Sécurité sociale, il a perdu la majorité au Sénat en 2010. Ce même Congrès peut lui barrer la route de la Maison Blanche en rejetant son incontournable proposition de relever le plafond permis de la dette publique, faute de quoi les Etats-Unis se retrouveraient dans la situation d´insolvabilité financière de la Grèce. C´est un président américain faible qui tente de faire avancer la solution des deux Etats, l´un palestinien et l´autre israélien, pour régler durablement le problème israélo-palestinien. Or, il n´a pas les mains libres face à un Congrès puissant et acquis aux thèses israéliennes. La «contagion républicaine» a gagné l´Europe. La plupart des dirigeants européens sont revenus à leur tour sur les engagements qu´ils avaient pris de reconnaître le futur Etat palestinien dès sa proclamation par l´Assemblée générale de l´ONU en septembre prochain. Les «27» alignés sur Washington Tous se retranchent, aujourd´hui, derrière la très commode formule de la «position commune» sur les questions de politique étrangère. La ministre espagnole des Affaires étrangères, Mme Trinidad Jimenez, parle aussi pour les «27» quand elle affirme que l´Espagne reconnaîtra le futur Etat palestinien si telle est la position que prendra Bruxelles. Or il est certain que Bruxelles s´alignera sur Washington sur la question de la création de l´Etat palestinien, en laissant comme toujours l´impression d´être solidaire du Monde arabe. Tous les pays européens, sans exception, ont tout fait bloquer la seconde «Flottille de la Liberté» et n´ont protesté que du bout des lèvres lorsque leurs ressortissants pro-palestiniens étaient brutalisés à l´aéroport Ben Gourion de Tel Aviv. Le débat sur l´entrée de la Palestine à l´Onu intervient dans une conjoncture des plus défavorables pour le président Mahmoud Abbas. Le Monde arabe est en ébullition et la «sécurité» d´Israël plus que jamais la priorité des priorités pour Washington et les alliés qui bombardent la Libye et se préparent à une guerre contre la Syrie. Les pays du Golfe qui assurent l´essentiel des approvisionnements énergétiques du monde occidental sont pris dans la tourmente de ces événements, au Yémen voisin, en Syrie et de la guerre de Libye. La priorité de ces monarchies n´est donc pas d´user de pressions pour mettre le prix du baril de pétrole hors de portée des bourses occidentales – la seule arme dissuasive pour faire avancer la cause palestinienne – et relever le défi lancé par le Congrès américain à la face du Monde arabe. Ces monarchies entendent solder leurs vieux comptes avec Kadhafi, maudit par le roi Abdallah d´Arabie, et en finir au plus tôt avec le régime syrien allié de l´Iran. La question palestinienne peut donc attendre encore. La balle est dans le camp arabe Les hésitations à aller de l´avant pour forcer la communauté internationale à réparer sans plus de délais l´injustice de 1947 risquent de freiner la «détermination» de Mahmoud Abbas, à la veille d´effectuer un périple infructueux en Europe pour recueillir l´indispensable soutien des pays européens à l´entrée de la Palestine à l´Onu. Sa visite mercredi prochain à Barcelone, siège de l´Union pour la Méditerranée, prend déjà un aspect purement protocolaire. Les tergiversations européennes et américaines auront-elles raison, aussi, de la détermination affichée à Doha de mettre la communauté internationale devant ses responsabilités ? Hier, le Premier ministre palestinien Salem Fayyad a conditionné la proclamation en septembre prochain du futur Etat palestinien par la reprise immédiate des négociations directes avec Israël autour de la question d'El Qods, de la poursuite de la colonisation juive en Cisjordanie et du retour des réfugiés de 1948. Il y a de fortes chances pour que ces trois conditions soient rejetées en bloc par Benjamin Netanyahu. Avec la complicité des Etats-Unis et la passivité de l´Union européenne dans une conjoncture des plus défavorables aux Monde arabe, le Premier ministre israélien a déjà exclu tout retour aux frontières de 1967. Donc, des négociations pour quoi faire ?