Chose promise, chose due, serions-nous tentés de dire, puisque les commerçants qui annonçaient, depuis quelques jours, une flambée des prix des fruits et légumes, ont tenu leur promesse. Hier, les marchés d'Oran, même s'ils étaient bondés, affichaient des prix qui défiaient toute raison. «Ils ont préparé le terrain depuis bientôt dix jours en réduisant les quantités proposées et en dissimulant même certains produits pour finir par porter le coup de grâce à nos bourses», dira un quinquagénaire oranais, rencontré au marché de la rue des Aurès (ex-La Bastille). Pourtant, ce marché est connu pour pratiquer les prix les plus attractifs de la commune d'Oran. On y vend de tout à des prix abordables. Mais hier, il fallait bien aux marchands des fruits et légumes de participer à leur manière à la saignée des économies des ménages. A titre indicatif, le citron, un agrume très prisé pour la hrira du Ramadhan, était proposé à 500 dinars le kilo. Rien que ça pour des bourses maltraitées depuis quelques jours. La pomme de terre était proposée à 80 DA, tout comme la tomate, un légume pourtant périssable. Les autres légumes, à l'instar de la courgette, des navets, des carottes ou des betteraves rouges étaient proposés à des prix variant entre 75 et 100 DA. Cette flambée n'a pas épargné les fruits puisque les dattes de la saison dernière et qui ont séjourné durant de longs mois dans des chambres froides étaient proposées à 700 DA le kilo, un prix qu'affichait également la nectarine, un produit qui peine à séduire le palais des Algériens. «C'est une habitude et il faut savoir faire le dos rond durant la première semaine de ce mois sacré. Les prix vont refluer à partir de la deuxième semaine, ils seront plus abordables», affirme une ménagère qui avoue que malgré son expérience, elle subit elle aussi cette curée, «que voulez-vous, il faut bien garnir la marmite quel qu'en soit le prix». Les prix des viandes et des poissons, qui flirtent avec les cimes depuis des lustres ont eux aussi connu une augmentation. A titre d'exemple, la crevette qui se vendait il y a quelques jours à 1200 DA le kilo est aujourd'hui proposée, sans le moindre scrupule, à 2500 DA. La viande bovine a affiché hier 1000 DA et l'ovine 1300 DA. Curieusement, ces augmentations n'ont pas une raison logique puisque le marché de gros, bien achalandé, n'a pas connu de pénurie ou de flambée. «Ce sont les détaillants qui sont à l'origine de ces augmentations. Nous proposons la tomate à 25 voire 30 DA le kilo, et allez faire un tour du côté du marché des Mimosas qui est situé à moins de 100 mètres des halles centrales. Certains détaillants n'utilisent même pas de moyens de transport pour leurs marchandises qu'ils acheminent à pied mais cela ne les empêche pas de s'offrir des marges qui dépassent tout entendement», avouera un grossiste en fruits et légumes. Et en attendant un geste de compassion de ces commerçants à l'égard des petites bourses, les clients continuent de scruter l'horizon à la recherche d'un agent de contrôle qui pourrait sanctionner les fraudeurs. «Mais qui est l'agent qui osera s'aventurer dans cette faune tombée depuis des années sous le contrôle de gangs et autres réseaux de malfaiteurs. Le marché de la rue des Aurès échappe aujourd'hui à tout contrôle de l'autorité publique, c'est un constat que nul ne peut ignorer», dira la mort dans l'âme un habitant du centre-ville d'Oran.