Rentrer de vacances pour retrouver et le boulot et le jeûne a quand même quelque chose de dépaysant. Piètre consolation ou vraie sensation, la chose, qui n'arrive que très rarement est, bien sûr, dans les limites de la nouveauté. Une nouveauté qui, manifestement, n'a rien d'autre à offrir que ce qui fait l'essentiel de son charme. Le nouveau, c'est connu, on l'aime ou on le craint, mais on en attend toujours quelque chose. Et que peut attendre quelqu'un du fait nouveau qu'il retrouve son lieu de travail après un mois de repos forcé et retrempe simultanément dans une «ambiance» de Ramadhan obligatoire ? Rien. A moins que ce ne soit beaucoup de choses. Un peu bizarre tout de même d'attendre tant d'une chose qu'on n'a pas vu venir parce que, précisément, on ne l'attendait pas. Parce que, figurez-vous, repos forcé ou pas, on ne part pas en congé en pensant à l'arrivée du Ramadhan. On pense d'abord à se refaire une santé et accessoirement à appréhender le retour. Mais cet été est un peu spécial. On n'est pas parti au moment qu'on voulait parce que trop de monde voulait partir ou ne pas partir en même temps. On ne rentre pas non plus comme on a l'habitude de rentrer parce que sortir du repos annuel pour retrouver le repos du fait accompli a quelque chose d'embarrassant. Ce n'est pas encore prouvé mais les faits consacrés n'ont pas besoin de preuve : le repos, légal ou fatal, n'a jamais tué personne. Mais quand on sort de l'un pour entrer dans l'autre, ça coince quelque part. C'est comme si, la drôlerie en moins, on vous invitait à vous réveiller parce que c'est l'heure de la sieste. Cela coince tellement que certains, qui n'ont pas la réputation d'être des stakhanovistes notoires, se sont, paraît-il décidés à travailler en plein Ramadhan ! Pas plus tard qu'hier, un préposé de la poste racontait comment il n'a pas quitté son guichet pendant toute la journée. Comme derrière tout bonheur se cachent toujours d'autres bonheurs, la grève se fait ringarde, il y avait de l'argent, billets de deux mille compris, il n'y avait pas de panne de réseau et les délestages de Sonelgaz font partie de l'histoire ancienne. Tout ça à la fois, uniquement parce que l'ami postier a été contraint de partir en vacances un mois avant sa date habituelle ! Il y a de quoi se rappeler que le travail, c'est la santé. Ils sont en vacances depuis longtemps pour cause de débrayage. Les transporteurs de Tizi Ouzou commencent, selon des rumeurs dignes de foi et confirmées, à trouver la chose trop longue. Comme ils ne sont pas d'égale fortune, certains d'entre eux ont déjà sorti la calculette pour prouver que les temps peuvent être durs y compris chez ceux qui ne s'y attendaient pas. Alors ils pensent sérieusement à redevenir «réalistes». Et reprendre la route en plein Ramadhan. Les voyageurs, fatigués de ne plus voyager aussi souvent et de couper les routes parfois, se reposent, surtout que bientôt ils pourront aller travailler. Eux, ont cumulé le repos légal, le repos justifié par l'absence de transport, ils peuvent bien renoncer à celui du jeûne. Ce n'est pas prouvé, mais les rumeurs ont ceci de commun avec les choses consacrées : elles n'ont pas besoin de preuve. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir