Si les journées en ce mois de Ramadhan sont pénibles pour les ruraux de Djemaâ ouled Cheikh, les soirées sont une thérapie pour le physique et le moral. «La journée commence très tôt chez nous», dit Hadj Moha Benmira en indiquant qu'aux environs de 7 heures du matin, on fait sortir les bêtes après la traite, on nettoie les étables et les écuries, on donne à manger et à boire aux bêtes gardées pour l'engraissement. A 10 heures, le soleil est de plomb dans cette contrée sise sur les piémonts de l'Ouarsenis. Les bergers se réfugient à l'ombre des buissons et tentent un sommeil qui ne vient pas. Hadj Moha visite son jardin récoltant quelques légumes pour le repas de ses invités. A 12h, on rentre les bêtes et on se met à l'ombre. La chaleur est suffocante, on sue de tous pores et ce n'est qu'à l'approche de l'adhan du dho'hr, durant les ablutions que l'on profite des bienfaits d'une eau très fraîche tirée du puits. On se permet alors de se gargariser la gorge, de se mouiller abondamment la tête, les membres, le visage et surtout les lèvres. La prière accomplie, on partage l'espace ombragé pour s'allonger et discuter, tuer le temps, un temps qui s'allonge éperdument. Une bise venant de la forêt de pins vient titiller les narines et rafraîchir les tempes tout en sueur. «C'est bientôt El Assar», dit hadj Moha. On profite une deuxième fois de cette eau «bénite» en la circonstance, une eau qui réveille et donne du tonus, enfin le courage de supporter cette chaleur jusqu'à l'adhan du maghreb. La prière achevée, notre hôte sort son pick up et nous invite à une partie de chasse le long de la route qui mène vers El Hassania. Effectivement, avant le coucher du soleil, sur notre chemin, on rencontre plusieurs groupes de perdrix. Hadj Moha et son fils Sofiane ont abattu à eux deux, 5 jolies perdrix. Durant cette partie de chasse, on avait oublié la soif et la fatigue, la température se faisant un peu plus clémente. Encore une fois les ablutions qui détendent. Comme le adhan de la mosquée ne peut être entendu, on rompt le jeune 6 minutes après l'adhan de la télé. Du lait frais bien glacé n'étanchera pas la soif de la journée. L'eau du puits bien fraîche est délicieuse. Hadj Moha désigne la meïda bien garnie. «Après, vous aurez tout le temps pour boire», conseille-t-il. Ni la hrira, ni les salades, encore moins les plats de viande n'ont attiré l'attention ; la figue de barbarie sortie du réfrigérateur était disputée par les invités. Rassasiés, ou plutôt remplis d'eau, on s'adosse à la meule de foin pour sentir cette fraîcheur au parfum des différentes essences de la forêt qui envahit l'environnement. On se sent lourd, le café servi n'a eu aucun effet sur le sommeil qui nous envahissait. La fraîcheur, le clair de lune, le calme et la quiétude vous laisse tomber dans les bras de Morphée. Hadj Moha, pour ne pas nous déranger, s'assoupit à nos côtés quand l'aboiement d'un chien fait réveiller tout le monde, d'autres invités se sont joints à nous pour veiller ensemble. Au clair de la lune, on veillera jusqu'au Sobh.