Le ministre algérien de l'Intérieur et des Collectivités locales Dahou Ould Kablia a déclaré mardi craindre un fort taux d'abstention aux élections législatives du printemps mais doute d'une victoire islamiste. L'abstention "est une crainte qui m'habite (...) le scrutin des élections législatives par le passé n'a pas mobilisé grand monde, c'est celui où il y a le plus fort taux d'abstention (comparé aux élections locales et présidentielles, ndlr)", a déclaré M. Ould Kablia, interrogé par la radio publique chaîne III. Selon le ministre, les partis doivent choisir des candidats crédibles à même de pousser les citoyens à aller aux urnes sans quoi ces derniers risquent de s'abstenir, jugeant "que les candidats choisis ne correspondent pas" à leurs souhaits, a-t-il souligné. Interrogé sur la possibilité d'une victoire islamiste en Algérie, comme cela a été le cas dans les pays frontaliers, il a rétorqué qu'"il ne fallait pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué". L'Algérie est une exception dans la région, "c'est mon point de vue", a fait remarquer M. Ould Kablia. "Personne ne peut se mettre à la place du peuple pour dire vers quelle direction va se porter son choix". "L'électeur algérien connaît bien son monde. La comparaison avec d'autres pays n'est pas aussi probante. L'Algérie a ses spécificités, ses valeurs sociétales qui ne ressemblent pas forcément à ce qui existe ailleurs où les votes ont sélectionné des politiques plutôt que des valeurs", a-t-il ajouté. Dans un entretien publié mardi dans le quotidien francophone L'Expression, l'ancien chef du gouvernement Ahmed Benbitour a estimé "qu'il n'y avait pas de menace islamiste sur la république". M. Benbitour a rappelé que "la Constitution algérienne n'obligeait pas le chef de l'Etat à choisir le gouvernement à l'intérieur de la majorité parlementaire". Le patron du MSP (Mouvement de la société pour la Paix, islamiste, fort de quatre ministres au gouvernement), Bouguerra Soltani est lui, convaincu, d'un prochain raz-de-marée islamiste en Algérie: ses "ikhwane" ("frères", en arabe) "triompheront aux prochaines élections", a-t-il affirmé à plusieurs reprises. La presse algérienne a également publié mardi un appel de 168 personnalités islamistes, dont des dissidents du MSP, pour la création d'une liste électorale commune aux prochaines élections. Mais M. Ould Kablia ne croit pas à une telle possibilité. "Les partis islamistes existants ont des idées et des ambitions tout à fait différentes qui ne sont pas forcément des ambitions doctrinales, a-t-il dit à la radio. Je ne vois pas qui va se placer sous la tutelle de l'autre au niveau de ces partis". Les législatives sont prévues au printemps, à une date située autour du 19 mai, selon plusieurs sources. Reste qu'à ces élections, de nouveaux partis, dont plusieurs islamistes, devraient être agréés en vertu des réformes menées sous l'égide du président Abdelaziz Bouteflika pour couper court à toute contagion du Printemps arabe en Algérie.