Des militants anticolonialistes ont dénoncé le "révisionnisme" en France visant à réhabiliter les nostalgiques de l'Algérie française à travers notamment les honneurs à des anciens tortionnaires et à l'élévation de stèles à la mémoire de criminels de l'Oas. Pour le président de l'association Agir contre le colonialisme aujourd'hui (Acca), Alban Liechti, il est nécessaire de "garder la mémoire de tous les crimes commis par l'Etat français et ses militaires pour qu'ils ne se reproduisent plus". "Nous continuons d'agir pour qu'un traité de paix et d'amitié entre les peuples algérien et français soit signé entre les deux pays, signifiant la +réelle+ fin de la guerre (de libération nationale) à ceux d'extrême droite, aux monarchistes, pétainistes, catholiques intégristes et nostalgiques de l'empire colonial qui, 50 ans après, continuent à manifester contre la France républicaine", a-t-il déclaré lors d'une rencontre-débat tenue samedi soir au siège de l'Acca à Paris. Alban Liechti fût le premier appelé du contingent français à exprimer, en 1956, son refus de prendre les armes contre le peuple algérien, affirmant, dans une lettre au président de la République, qu'il ne porterait pas de fusil contre un "peuple en lutte pour son indépendance". A cause de ce "refus d'obéissance caractérisé", il purgera, à trois reprises, des peines de deux ans de prison, correspondant à chacun des trois appels sous les drapeaux. Il fût rallié à l'époque, par une quarantaine de "soldats du refus", pour la plupart des militants communistes. Intervenant à l'issue de la projection d'un film inédit "La guerre d'Algérie : le refus", il a rendu hommage à ces militants grâce à qui, a-t-il dit, la "bataille pour la paix en Algérie a évolué vers l'indépendance du pays". Le militant anticolonialiste Henri Pouillot a, de son côté, mis en garde contre un "revirement politique important" en France consistant à "réhabiliter le colonialisme et toutes ses idées de base", dénonçant l'érection, avec la "bénédiction de maires", de "stèles à la mémoire des criminels de l'Oas". "La loi de février 2005 glorifiant les bienfaits du colonialisme est l'aboutissement de ce revirement (...). Environ 70 villes en France abritent depuis 2002 des stèles pro Algérie française ou pro Oas et celles-ci s'ajoutent aux dix autres existant depuis 1960", a-t-il relevé, fustigeant la décoration de la légion d'honneur, en mai dernier par le président Sarkozy, de Jean-François Collin, président de l'Adimad, connue pour être la principale organisation en France regroupant des personnes condamnées pour leurs activités au sein de l'Oas. "Le chef de l'Etat français a récidivé en distinguant récemment de la légion d'honneur un des principaux artisans du putsch d'avril 1961 contre le général De Gaule, qui a déserté et rejoint l'OAS, avant de se retrouver aujourd'hui décoré de fort belle manière", a-t-il ajouté, estimant que cela "ne relève pas du hasard, mais d'une politique délibérée". Le transfert annoncé des cendres du général Bigeard aux invalides "participe de la même politique", a-t-il fustigé, annonçant que le ministre de la défense, Gérard Longuet, s'apprête à inaugurer samedi prochain à Perpignan un musée des Français d'Algérie, une sorte de "musée des anciens de l'Oas" dans cette ville, selon lui. Créée en 1986, l'Acca s'assigne comme principal objectif la lutte pour la "fin du processus colonial" à travers la "dissolution des armées coloniales d'occupation", la "suppression de l'Otan" et le retour des militaires sur le territoire français.