Le cinquantenaire de l'indépendance de l'Algérie sera au cœur de la 7eme Semaine anticoloniale et antiraciste, prévue du 23 février au 11 mars en France, à l'initiative de "Sortir du colonialisme", un collectif d'associations né dans le sillage de la contestation de la loi du 25 février 2005 sur "l'apport positif de la colonisation". Selon le président national du Collectif, Henri Pouillot, cette semaine verra notamment le lancement d'un appel pour la "reconnaissance par les plus hautes autorités de la République française du crime d'Etat" que furent les massacres des Algériens du 17 octobre 1961 à Paris et l'ensemble des crimes contre l'humanité perpétrés par la France durant sa période coloniale en Algérie. "Il s'agit d'appuyer les appels lancés en 2011 à l'occasion du cinquantenaire de ces massacres par le collectif Au nom de la Mémoire, du journal en ligne Mediapart et du collectif du 17 octobre 1961, et signés par des milliers de personnes, et exiger de l'Etat française de reconnaitre ses crimes coloniaux", a-t-il précisé jeudi à l'APS. Un regard sur trois grandes tendances adoptées par les français sur la guerre d'indépendance algérienne est également prévu à l'occasion de cette semaine. Ces trois visages sont représentés par la "répression", la "fascisation" ou la "fraternité" avec le peuple algérien. Le premier est représenté par la marche de Charonne le 8 février 1962, un crime d'Etat qui sera évoqué lors d'une rencontre animée par Henri Malberg, Conseiller de Paris, responsable de la Commission Justice au Pcf (Parti communiste français). La répression policière, qui avait fait ce jour-là neuf morts et des centaines de blessés, est vue comme une "volonté consciente (de l'Etat français) d'occulter la page de la guerre" d'indépendance nationale : "une décision prise au plus haut niveau de l'Etat de ne pas nommer cette guerre pour mieux en dissimuler les crimes", estiment les organisateurs. Le second visage est celui de la fascisation incarnée par le moment Oas, ou "les aventuriers de la cause perdue", comme les surnomme Jean-Paul Gautier, historien et politologue, spécialiste des extrêmes-droites, qui animera un débat sur le sujet. Le troisième visage est celui de Français de solidaires avec la guerre d'indépendance nationale, incarnés par les Soldats du refus. Ce débat sera animé par Nils Andersson, éditeur et politologue, qui a notamment fait paraître en Suisse pendant la Guerre d'Algérie certains livres interdits en France se rapportant à cette solidarité d'une partie, quoiqu'infime, du peuple français. A cette occasion aussi, un coffret de quatre CD, Algérie Musiques Rebelles, fera (re)découvrir les musiques authentiques du peuple algérien en lutte pour reconquérir sa liberté et son indépendance. Selon les organisateurs, l'initiative vise à célébrer l'Indépendance de l'Algérie en mettant en sons et lumières l'art et la culture de son peuple, tout en déconstruisant une "mémoire officielle constellée de glorieux faits d'armes et autres missions civilisatrices, écrite en falsification de la vérité". Ce coffret est accompagné de son livret d'une vingtaine de pages, présenté comme un concentré d'histoire et de musicologie. Le tout replacé dans le contexte de la lutte anticoloniale, des années 30 jusqu'en 1962, année de l'indépendance nationale. Des tables rondes et des projections de documentaires sur le processus de paix au Moyen-Orient, en Afrique du Sud et en Irlande, figurent par ailleurs au programme de cette semaine coloniale. L'évènement sera prolongé jusqu'au 17 mars, jour durant lequel est prévue une "marche solidaire des peuples en lutte", à travers toute la France, organisée par "Sortir du colonialisme" et le Collectif "D'Ailleurs nous sommes d'ici". A Paris, la procession s'ébranlera à 14 heures de Barbès, dans le 18e arrondissement, pour rallier la place de la République, où un gala musical sera animé. Cette journée de mobilisation vise à marquer la célébration du cinquantenaire des indépendances qui, selon les organisateurs, "n'a pas mis fin à la politique néocolonialiste de la France où comme ailleurs, la crise économique et sociale s'appuie sur une offensive sécuritaire, xénophobe, islamophobe et raciste pour amputer les droits et libertés démocratiques de toutes celles et ceux qui vivent et travaillent dans le pays".