Le ministère tunisien des Affaires étrangères a dénoncé mardi "une ingérence américaine" dans la justice tunisienne après les déclarations de l'ambassadeur des Etats-Unis en Tunisie sur la condamnation du patron de la chaîne Nessma pour "atteinte aux bonnes mœurs". "Les déclarations de l'ambassadeur américain en Tunisie constituent une ingérence dans la justice tunisienne", a déclaré le ministère dans un communiqué, cité par l'agence officielle TAP. "Le gouvernement est attaché au renforcement des relations d'amitié et de coopération entre la Tunisie et les Etats-Unis tout en veillant à ce qu'elles soient fondées sur l'entente, la concertation, le respect de la souveraineté et des intérêts communs", selon les termes du communiqué. Le diplomate américain Gordon Gray, avait exprimé jeudi sa "préoccupation" et sa "déception" après l'annonce du jugement condamnant le patron de Nessma, Nabil Karoui. M. Karoui était poursuivi après la diffusion du film franco-iranien Persepolis qui raconte les dérives du régime iranien à travers les yeux d'une petite fille. En cause: une scène où Allah est dessiné, un blasphème interdit par l'islam sunnite. Il a été condamné jeudi à payer une amende de 2.400 dinars (1.200 euros) pour la diffusion d'un film "troublant l'ordre public et portant atteinte aux bonnes mœurs", selon la décision du tribunal de première instance de Tunis. Cette "condamnation soulève de sérieuses préoccupations au sujet de la tolérance et la liberté d'expression dans la nouvelle Tunisie", avait déclaré M. Gray dans un communiqué. "Je suis préoccupé et déçu par la condamnation de la diffusion par la chaîne Nessma d'un film d'animation dont la distribution avait été préalablement approuvée par le gouvernement tunisien", avait ajouté l'ambassadeur. Le ministère tunisien des Affaires étrangères a souligné aussi que le gouvernement "respecte l'indépendance de la justice conformément aux normes internationales", affirmant que "la liberté d'expression en Tunisie est un droit légitime". Amnesty International a dénoncé une affaire qui "met en lumière les attaques contre la liberté d'expression". L'Union européenne (UE) a exprimé sa "déception" après l'annonce de la condamnation.