XVe siècle, péninsule ibérique : juifs et musulmans, victimes de massacres, devaient se convertir au christianisme ou quitter le pays. Aujourd'hui, ces événements se lisent dans les gènes des habitants de la région. Après avoir reconquis le territoire et battu les musulmans, les rois catholiques espagnols mirent fin à la diversité religieuse de la péninsule ibérique. L'héritage historique de l'Inquisition espagnole qui s'ensuivit, et qui a forcé les fidèles des deux religions à se convertir, a laissé des traces dans le patrimoine génétique des Ibériques. Grâce à une analyse ADN menée sur la population actuelle d'Espagne et du Portugal, des chercheurs ont pu quantifier l'ampleur de cette intégration forcée. Selon cette étude menée par Mark Jobling de l'université de Leicester, en Grande-Bretagne et ses collègues portugais, espagnols et israéliens, 10,6% des habitants actuels de la péninsule ibérique ont des ancêtres maures et 19,8% des ancêtres juifs sépharades. Ces résultats attestent d'un niveau important de conversions, analysent les chercheurs. Pour parvenir à ces chiffres, les chercheurs ont étudié le chromosome Y de plus d'un millier d'hommes, espagnols et portugais. Pour établir leur proximité avec la population européenne, sépharade ou maure, ils ont d'abord établi le profil type du chromosome Y des populations arabes et berbères actuelles d'Afrique du Nord, des populations issues des juifs chassés d'Espagne en 1492 et enfin des Basques, considérés comme proches des populations européennes d'origine. La répartition des descendants des juifs ou des musulmans convertis n'est pas la même sur tout le territoire, précisent les chercheurs qui publient leurs travaux dans l'American Journal of Human Genetic. La carte des origines maures d'après le chromosome Y ne reflète pas celle de la colonisation musulmane ni du retrait de la population arabe. Elle serait donc bien la trace de l'intégration, forcée s'entend, liée à la politique de christianisation des rois catholiques et de la redoutable Inquisition.