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l'islam en espagne proche et lointain (1re partie)
L'ISLAM EN ESPAGNE
Publié dans L'Expression le 15 - 03 - 2005

" Enseigne une langue, tu éviteras l´absurdité d´une guerre. Répands une culture, tu rendras un peuple auprès d´un autre populaire " Noaim Boutanos
Pour pouvoir décrire la formidable épopée de l´Islam en Espagne, il est bon de revenir sur l´expédition musulmane au Maghreb. La plus conséquente eut lieu en 681-682 et permit au général Oqba Ibnou Nafi de fonder la ville de Qaïraouan en Ifriqya, dans le centre de la Tunisie actuelle. L´occupation définitive eut lieu entre 695 et 708. Les Berbères tout en gardant leurs spécificités culturelles, furent littéralement subjugués par la profondeur de l´Islam et s´y convertirent par conviction. La grande barrière dominant/dominé tombe pour la première fois sans retour depuis l´aurore de la civilisation berbère (comme en témoigne dix-huit siècles auparavant la résistance à l´invasion phénicienne). Il s´est produit note E.F. Gautier : " Une révolution immense. Le pays a franchi la cloison étanche partout ailleurs qui sépare l´Occident de l´Orient. Comparées à un tel saut dans l´inconnu, nos révolutions française et russe apparaissent mesquines". (1)
L´Espagne est peuplée dès le paléolithique. Ses premiers habitants historiquement connus sont les Ibères. À la fin du IIe millénaire, Phéniciens et Grecs fondent des comptoirs sur les côtes. Au Ve s. apr. J.-C. : les Vandales envahissent le pays. Après que le général berbère Tarik Ibn Zayad ait franchi les colonnes d´Hercule appelées depuis Gilbraltar " Djebel Tarik " sous la bannière de l´Islam et graduellement toutes les régions sont conquises et l´Andalousie en Wisigoth " landalost " devenue el Andalous en constituera le fleuron. En une seule bataille, il met fin au règne des Wisigoths en 711. Les armées musulmanes poussent leur avantage jusqu´en Gaule (France actuelle). Les Musulmans avaient profité des dissensions qui déchiraient le royaume wisigoth pour submerger et conquérir l´Espagne en quinze mois. En 719, les conquérants musulmans s´emparent de Narbonne. En 721 nous dit Mercier, Es Shambi Ben Malek El Khaoulani avec une armée innombrable venant d´Espagne, se répand sur l´Aquitaine et vient mettre le siège devant Toulouse.(2)
Comme l´écrit Ch.A.Julien, la retraite des Arabes est moins due à l´ardeur des Francs qu´aux révoltes dans le Maghreb. Ces révoltes sont dues pour une grande part à l´exploitation des masses berbères islamisées par toutes sortes d´impôts imposés par les gouverneurs installés à Kairouan et qui règnent pour le compte d´abord des Ommeyades puis à partir de 750 pour le compte des Abbassides.(3)En définitive, la fulgurante expansion de l´Islam n´est pas due à la puissance militaire, qui joua un rôle limité, mais, avant tout, au fait que, dans des sociétés où 4000 ans de civilisation sombraient dans le chaos, un monde nouveau donnait un visage à l´espérance des multitudes accablées. L´une des raisons principales de l´expansion rapide de l´Islam, c´est qu´à une vision statique du monde, figé dans des hiérarchies sociales fondées sur le sang, il substituait une vision dynamique du monde et de la société, restaurant la valeur de la responsabilité personnelle dans des sociétés où le système féodal l´avait refoulée. L´Islam apportait l´âme d´une nouvelle vie collective.(4)
En Espagne, les cavaliers musulmans (près de 12.000 dont l´immense majorité était berbère), ne s´imposèrent pas par la force militaire. Ils furent accueillis en libérateurs par le peuple, qu´ils libéraient de l´oppression des rois wisigoths dégénérés, d´évêques et de féodaux despotiques. L´arianisme chrétien que pratiquaient les " autochtones ", mettant peu l´accent sur la Trinité, facilita la pénétration de l´Islam.(5)
En l´an 1009, une révolution plonge al-Andalus dans la guerre civile et le califat se divise en dizaines de principautés, " Moulouk Attaouef " les taifas. Celles-ci occupent les deux tiers de la Péninsule, du sud jusqu´à une ligne, au nord, allant de la Catalogne à la Galice. La Reconquête chrétienne précise sa menace avec la prise de Tolède, en 1085. Les taifas sont alors annexées par les Almoravides, qui viennent d´achever l´unité du Maroc, puis par les Almohades, eux aussi venus d´Afrique du Nord et qui établiront leur capitale à Séville. Une nouvelle dynastie, celle des Nasrides, occupe pendant deux siècles ce qui n´est plus qu´un réduit majestueux: Grenade.
C´est une paix précaire ponctuée de razzias et d´incidents sur les lignes frontières. Malgré la pression chrétienne, l´art et la civilisation d´al-Andalus sont florissants sous ces deux dynasties. Puis c´est la défaite de Las Navas de Tolosa, en 1212. Elle marque le début du déclin, mais inaugure aussi le temps d´un répit.
L´héritage berbère et arabe de l´Espagne
Pendant près de huit siècles va fleurir en Espagne une civilisation sophistiquée, d´artisans, de guerriers et de poètes, celle d´al-Andalus, nom donné par les Arabes aux territoires conquis de la péninsule Ibérique. Elle connut son apogée à partir de la fondation de l´émirat de Cordoue, en 756, par l´Omeyyade Abd al-Rahman, tandis que s´effondrait la dynastie wisigothe jusqu´alors maîtresse des lieux depuis l´effondrement de l´Empire romain.
L´aventure arabe en Espagne fut à ses origines, avant tout, un exil: celui des Omeyyades de Syrie, chassés par les Abbassides de Bagdad. Poète et premier émir d´Espagne, Abd al-Rahman Ier (756-788) entreprend l´édification de la mosquée de Cordoue et plante dans sa nouvelle terre l´arbre de son désert natal, le palmier.
Gustave Le Bon a raison d´écrire : " La transformation ne fut pas seulement matérielle, elle fut aussi morale. Les musulmans apprirent aux chrétiens, la plus précieuse des qualités humaines: la tolérance. Leur douceur vis-à-vis de la population conquise, fut telle qu´ils avaient permis à leurs évêques de tenir des conciles. Ceux de Séville en 782 à Cordoue en 852 peuvent être cités en exemple."
A l´époque régnaient en Espagne des rois très tolérants envers les Gens du Livre, " Ahl el Kitab "." Comme l´écrit Sédillot rapporté par Le Bon, les rois catholiques de Navarre avaient tellement confiance dans la loyauté et l´hospitalité arabe que plusieurs d´entre eux n´hésitaient pas à se rendre à Cordoue pour consulter les médecins si renommés de la ville ".(10)
L´Alhambra est cette "cité ceinte de murailles-tours de pierre d´une solidité exceptionnelle qui ne pouvait être conquise ni par la force, ni par l´habileté des soldats, ni par aucune machine", que décrit un chroniqueur italien de la Reconquista, Pietro Martire de Anghiera. A l´une des portes de la forteresse, une plaque témoigne de l´émerveillement que provoque chez le visiteur cet enchevêtrement de palais et de jardins, de fontaines et de patios, de tours et de murs d´enceinte: "Même s´il ne restait que les ombres de ces murs, leur souvenir serait impérissable, comme le refuge unique du rêve et de l´art."
Mais Grenade, par-delà la magie de l´Alhambra, est alors un royaume assiégé, isolé, déchiré par les intrigues. Elle est le coeur rétréci et usé de ce qu´il reste du vaste empire arabe d´Espagne, désormais réduit à 30.000 kilomètres carrés dans le sud-est de la Péninsule - couvrant à peu près les trois provinces andalouses actuelles de Grenade, Malaga et Almeria - où vivaient quelque 350.000 habitants. Un dernier bastion, merveilleux, ardemment désiré, certes, mais aussi replié sur lui-même, obsédé de sa gloire passée, culturellement sclérosé, finalement condamné et bientôt pleuré à travers toutes les terres de l´Islam comme un paradis perdu par "les hommes pieux, écrira le poète Yahya al-Qurtubi, adorant Dieu et l´implorant tandis que sur leurs joues coulent des larmes en abondance".
Que reste-il de cette coexistence pacifique unique dans l´histoire de l´humanité? Une époque où on vit se côtoyer la fine fleur savante appartenant aux trois religions du Livre Rochd (Averroes). Sait-on par exemple que la langue espagnole contient plus de 1 500 mots espagnols d´origine arabe dont 800 commencent par l´article al ; l´algarabia (langue parlée par les Morisques subsistant au XVIe siècle) a donné le charabia français.(6)
La Reconquista et la chute de Grenade
Pour les Rois Catholiques, et avec eux toute la chrétienté alarmée par la poussée, à l´est, de l´Empire ottoman, qui a conquis Constantinople en 1453, il s´agit d´une nouvelle croisade. Ses premiers succès sont impressionnants. De 1485 à 1487, les musulmans perdent le tiers occidental de leur territoire. Les sièges, comme celui de Malaga, sont interminables, les harcèlements, constants. En 1490, Ferdinand d´Aragon et Isabelle de Castille décident d´en finir et s´attaquent à la capitale, Grenade. Pour cela, ils réunissent une immense armée, forte, selon les chroniqueurs, de 60.000 à 80.000 hommes, qu´ils installent, en avril 1491, dans la plaine de la Vega, où ils édifient, après d´immenses travaux qui dureront huit mois, une ville: Santa Fe, "la Sainte Foi". C´est à présent une bourgade sans charme qu´on pourrait ignorer si un panneau, sur la route, ne la désignait comme le "berceau de l´hispanité".
Boabdil était le nom que les chrétiens avaient donné au roi soupirant, Abu Abd Allah Muhammad XI. Le dernier roi maure d´Espagne. El rey chico, le petit roi, diront de lui ses vainqueurs de Castille. Al-Zogoybi, le malchanceux... Le 25 novembre 1491, Boabdil signe avec les Rois Catholiques les conditions de la capitulation de la cité musulmane. Le texte est généreux pour les vaincus, puisque, en échange de la souveraineté chrétienne sur la ville, les Grenadins conservaient la liberté de culte et le droit de garder armes et chevaux. A Boabdil, lui-même, il fut promis à titre héréditaire une seigneurie couvrant l´ensemble des Alpujarras, la région montagneuse au sud de la sierra Nevada. A l´aube du 2 janvier 1492, le roi arabe et 300 hommes armés quittent la citadelle tandis qu´y entre le grand commandeur de Leon, flanqué de 500 cavaliers et de 400 fantassins. Selon un chroniqueur, Bernardo del Roi, que cite Bernard Vincent, une messe est dite dans l´Alhambra, "en ce lieu qui avait été profané pendant huit cents ans". Puis le roi et la reine, "à la tête de 10.000 cavaliers et 50.000 fantassins, firent une solennelle et pacifique entrée".
" Nous imaginions, écrit Michel Faure, une longue route poudreuse, restée dans l´Histoire sous le nom de la cuesta de las Lagrimas, la côte des Larmes.... Et sur ce chemin des larmes qui s´élève vers les montagnes... un roi humilié, enfin, qui marche, lentement, vers le sommet du mont Padul, se retourne et soupire. C´est un dernier regard. Le roi sait que, dès qu´il poursuivra sa route vers le sud, passé ce col, à sa vue sa ville tant aimée, si douce et si disputée, se dérobera. Il soupire, et sa mère, dit la légende, l´apostrophe: "Pleure comme une femme ce que tu n´as pas su défendre comme un homme." Il voit autour de la ville les tentes des armées de Ferdinand et d´Isabelle, les Rois Catholiques qui viennent, avec sa reddition, d´achever leur "Reconquête" de l´Espagne chrétienne.(7)
Grenade devient le symbole des ambitions des Rois Catholiques, intégristes chrétiens qui expulseront, cette même année 1492, les Juifs d´Espagne, pays qu´abandonneront bientôt, à leur tour, les musulmans. Ferdinand et Isabelle y font construire une cathédrale et une chapelle pour recevoir leurs sépultures. D´autres monuments suivront, et une ville chrétienne s´édifie au pied de l´Alhambra arabe, tout en préservant le quartier maure de l´Albaicin. A la fin du quinzième siècle et avant même la chute de Grenade en 1492, un assez grand nombre de musulmans andalous avait perdu l´usage de l´arabe pour qu´un mufti, en l´occurrence Don Iza de Chabir (Aîssa Ben Djaber), ait jugé nécessaire de leur traduire le Coran en espagnol. Cette initiative avait pour but de pouvoir maintenir dans la religion de l´Islam les Maures, malgré l´adversité et en utilisant l´arme de l´adversaire, en l´occurrence sa langue. Le clergé espagnol à son tour et du fait de la politique de la conversion forcée se retrouvait certaines fois avec de nouveaux chrétiens arabes et qui ne parlaient pas espagnol. Certains prêtres et c´est le cas en l´occurrence rapporté par Berbrugger de Bartolomé Dorador, se sont alors mis à traduire l´Evangile en arabe et à s´efforcer de parler en arabe aux nouveaux convertis.(8)
1.E.F.Gautier cité par Ch.A.Julien.p.11 : Histoire de l´Afrique du Nord, tome 2.Editions Sned. Alger. (1978)
2. Mercier-Seguin : La bataille de Poitiers. Revue Africaine.Vol.87.p.33-92.(1943).
3. Ch. A. Julien : Histoire de l´Afrique du Nord Ed.Payot,1952. Paris. Enal.Alger.(1978)
4.R. Garaudy : Appel aux Vivants.p.191.Editions du Seuil. Paris. (1980)
5. R. Garaudy : Appel aux Vivants.p.204. Editions du Seuil. Paris. (1980)
6.C.E. Chitour : Histoire religieuse de l´Algérie. Editions Enag. Alger. 2002
7. Michel Faure, Les monts mythiques. Le soupir du Maure, Col du chagrin. L´Express du 25/07/2002
8. A. Berbrugger : Breviaro Sunni ou bréviaire de la Sounna. Revue Africaine. Volume 13.pp. 73- 76.(1869).


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