L'ancien PDG de Sonatrach, Abdelmadjid Attar, a expliqué hier les récentes affaires de corruption qui ont secoué la compagnie nationale des hydrocarbures par «la centralisation des décisions et la hausse des recettes pétrolières». «Il y a plusieurs niveaux d'intermédiation entre les ingénieurs et les directeurs, alors qu'il faut décentraliser les décisions pour éviter la corruption», a-t-il recommandé lors du Forum du quotidien Liberté. «Je suis désolé, car je me mets à la place des travailleurs de Sonatrach. Ça doit être douloureux. Suite à ces affaires, les cadres de la compagnie ne vont pas prendre d'initiatives», a-t-il confié, ajoutant que «du temps où il était PDG de la compagnie, il n'avait jamais signé de contrat». Les cahiers des charges sont élaborés par des ingénieurs et les contrats sont signés par les directeurs concernés, a-t-il ajouté. Hormis la décentralisation des décisions, durant la fin des années 1990, «il n'y avait pas autant de projets, ni autant d'argent», a-t-il fait remarquer, en suggérant un nouveau management pour l'entreprise. Au sujet du préjudice que pourraient apporter ces affaires à la réputation de Sonatrach à l'international, il a souligné qu'«il n'y a pas de raisons pour susciter les inquiétudes des partenaires de la compagnie». Cependant, il a estimé que les personnes citées dans les affaires Saipem et SNC Lavalin ne sont pas encore jugées. «Ces individus sont innocents jusqu'à preuve du contraire. Laissez la justice faire son travail», a-t-il dit, recommandant un nouveau management à Sonatrach. Quant à l'attentat terroriste perpétré sur le site gazier de Tiguentourine, M. Attar est convaincu que les investisseurs étrangers ne quitteront pas le pays car ils ont investi de grands montants, évalués à des milliards de dollars. L'affaire a, certes, «secoué» l'Etat, la Sonatrach et ses partenaires car «c'est un risque nouveau qui vient de l'extérieur». Hormis une amélioration de la protection des sites, l'impact de l'acte terroriste sera perceptible sur les futurs projets qui enregistreront des retards de plusieurs mois, voire un an, pour leur réalisation. Les partenaires de Sonatrach renégocieront également les coûts supplémentaires. Il n'y aura plus un deuxième Hassi Messaoud S'inquiétant pour l'avenir des prochaines générations, M. Attar a prévenu que l'Algérie ne fera plus de nouvelles découvertes d'hydrocarbures de la taille de Hassi Messaoud ou de Hassi R'mel. «Les grosses découvertes, c'est fini», a-t-il prévenu d'un ton ferme. Parallèlement, l'Algérie a consommé la moitié de ses réserves pétrolières et il ne reste que 4500 milliards de m3 de gaz sur les 10 000 milliards de mètres cubes découverts. Le principal axe des réserves pétrolières se situe entre In Amenas et Hassi R'mel, le reste, ce sont de petits gisements marginaux ou difficilement exploitables. Il parlera aussi de la hausse du prix de revient de l'extraction du pétrole qui est passé de 4 à 5 dollars le baril durant les années 1990, à plus de 15 dollars/baril, à cause de la hausse des prix des services et des assurances notamment. Le niveau de production ne peut être maintenu sans la révision de la fiscalité pétrolière qui doit être incitative pour les investisseurs pétroliers. L'Algérie compte au moins 50 gisements marginaux à exploiter, notamment à Ouargla, Hassi Messaoud et autour du site gazier de Tiguentourine. Avec la constante hausse de la demande nationale, les réserves de pétrole seront épuisées en 2030 et celles du gaz en 2040. Parallèlement à la continuelle hausse des prix du baril depuis 2005, le taux de croissance économique est en baisse depuis 2005. «Ce qui n'est pas normal», s'est-il étonné. En dépit du recul de la production du pétrole et du gaz, depuis 2007, la dernière décennie a été marquée par le retard de réalisation du programme de maintenance des gisements. La compagnie nationale a «souffert» de la pression de l'Etat qui voulait plus de rentrées en devises. A propos de la nouvelle loi sur les hydrocarbures, il a considéré qu'elle répond aux nouvelles donnes et au contexte international actuel dans le domaine de l'énergie. Les précédentes lois ne prévoyaient pas d'articles au sujet des gaz de schiste, qui est une nouvelle source d'énergie. Même si le gaz de schiste n'est pas rentable pour le moment, Sonatrach a entamé des études pour évaluer le coût financier et l'impact environnemental de son exploitation. En partenariat avec des investisseurs étrangers, l'exploration du gaz de schiste se fera dans les régions du Sud où il n'y a aucune agriculture ou activité humaine. Formel, M. Attar a avancé que «le gaz de schiste ne constitue pas de risque de pollution de la nappe albienne car les forages ne sont pas profonds». Sollicité pour donner son avis au sujet des grands volumes d'eau utilisés pour son extraction, il a relevé que même le pétrole nécessitait d'importants volumes d'eau. «Nous injectons 63 millions de m3/an à Hassi Messaoud pour permettre au gisement de continuer à fonctionner».