Rencontrée lors de sa venue pour le rassemblement des artistes sensibilisés à la cause palestinienne, Yasmina Saâdoun, artiste engagée, estime que ce peuple est privéde ses droits les plus élémentaires. Consacrée par de nombreux prix et trophées nationaux, Yasmina se caractérise par une grande pondération et beaucoup d'urbanité. Née à Constantine, qui a engendré tant de personnalités du gotha de la culture, c'est une passionnée de l'art pictural. Consciente de la situation peu enviable de la femme et taraudée par ses problèmes, ses toiles largement imprégnées en portent les stigmates. Sombres, elles sont animées par un espoir intérieur qui émane de cette floraison de tons et de florilège de couleurs.Dans cet entretien, Yasmina Saâdoun, qui exerce comme enseignante d'art, explique sa thématique de prédilection et justifie le choix judicieux des tons. Pourquoi toute votre œuvre focalise sur la femme ? Parce que je suis une femme avant tout. Et tout ce qui la préoccupe m'intéresse et m'interpelle. Dans mes toiles, on retrouve d'autres personnages qui ne sont ni femmes ni hommes. Ils sont incognito ; asexués. On voit beaucoup de silhouettes que l'on ne distingue pas vraiment. Je suis attirée par la femme avec ses bijoux et les couleurs de ses habits qui s'associent à la féminité. Dans mes compositions, j'utilise particulièrement le personnage comme grand H... C'est le point nodal de mon œuvre et de mon inspiration. Vos femmes sont tristes ; faites-vous référence à la situation de la femme algérienne ? Oui, c'est une réalité. La femme est forte au fond. Mais les traditions l'enserrent dans un carcan de tabous et limitent sa liberté. Il faut avouer que notre société est une société d'homme, une société machiste. Seule la religion donne à la femme une très grande valeur et une noblesse. Ces femmes sont sans visages ; pourquoi ? Ces femmes sont sans bouche parce que leurs paroles ne sont pas entendues. Mais leurs yeux sont un élément essentiel dans mon travail, un portail le de l'intérieur qui va vers l'extérieur. Dans leurs yeux, on lit toutes leurs détresses, leurs souffrances et leurs inquiétudes. Apparemment, vous avez une prédilection pour la peinture à l'huile. Utilisez-vous d'autres matériaux ? La technique de la peinture à l'huile s'imbrique avec mes sentiments ou états d'âme, et mes perceptions des la technique de peinture à l'huile est plus flexible ; et l'on peut faire différentes textures, dont les choses de la vie. Mais j'utilise également des techniques mixtes, comme le collage, l'aquarelle, les pastels et l'acrylique. Vos toiles avec ces personnages sombres sont en même temps pleines de couleurs vives respirant la vie ? N'y a-t-il pas un paradoxe ? J'aime beaucoup les couleurs et les tons pastel, particulièrement la couleur orange et le jaune, et différentes nuances de jaune et de rouge. Les femmes sont tristes, car elles n'ont pas réellement de droits, mais elles sont pleines de vie, d'où ces teintes vives et criardes. Mes tableaux dégagent cette impression d'espoir en une vie meilleure. Entretien réalisé par Kheira Attouche