A lire certains commentaires publiés sur le sujet, on ressent (pour les avertis) qu'il n'y a qu'un seul son de cloche. A écouter l'une ou l'autre partie on a aussi l'impression que votre interlocuteur veut faire passer un message de victimisation et rendant le grand perdant dans toute l'affaire une partie ou l'autre. En circulant dans Ber Er Ryane (contrée paradisiaque) ce sont des complaintes qui se dégagent des murs porteurs d'une histoire et sur certains est écrit «lilbayea» (à vendre). Les murs gémissent de douleurs causées par la haine inexpliquée et inattendue. Comme des orphelins qui viennent de perdre leurs parents. Tel est le sort, espérons qu'il ne soit que conjoncturel, des habitations désertées par leurs propriétaires d'une rive ou de l'autre pour aller habiter au milieu des leurs. Il est question de sécurité et de survie, on nous dira en passant, sans donner d'explication cohérente tout en regrettant les ex-voisins avec qui le sel, les moments de douleur et de liesse ont été partagés. Aucune des personnes avec qui nous avons engagé la discussion n'accepte cette situation fratricide et n'a une explication des tenants et aboutissants de ce qui se passe en la demeure. Tous, à de rares exceptions, se défendent et rendent le vis-à-vis fautif. Heureusement qu'en Ber Er Ryane il existe encore des adeptes de Cheikh Bayoud et qui défendent la pluralité et la coexistence pacifique, tout comme de «l'autre côté», qui expliquent qu'ils sont à Berriane depuis la guerre de Libération nationale, où le jour de l'indépendance il n'y avait qu'une seule voix pour un seul pays. «Je veux récupérer mes voisins d'abord et mon activité ensuite» Alors pourquoi tout cela ? Pourquoi est-on arrivé à ce stade ? Pourquoi aussi les jeunes n'écoutent plus les sages et persévèrent dans la confrontation ? A toutes ces questions, les réponses restent vagues et imprécises sauf peut-être pour la dernière. Nous gardons cette analyse développée par l'un des sages qui dira en substance : «Depuis l'avènement des différents affrontements, des regroupements par affinité ont eu lieu soi-disant pour assurer l'autodéfense dans les deux parties. A tel point que les établissements scolaires aujourd'hui accueillent chacun les enfants d'une communauté. On est revenu à l'ère grégaire et à ce stade le dialogue devient difficile, surtout lorsque des gens déménagent pour se réinstaller auprès des leurs dans des conditions parfois déplorables et dramatiques, celles de la promiscuité. Cela ne doit pas durer, nous dira-t-il, il nous faut trouver une solution définitive et les choses vont se tasser avec le temps.» Une personne présente avec nous, excédée par ce qui arrive à son paradis, n'a pas tergiversé dans ses propos : «L'Etat ne doit plus être clément avec les fauteurs de troubles, celui qui cause un tort doit payer même si c'est mon fils. Nous ne pouvons plus supporter ces dérapages. Ce sont les citoyens qui payent les pots cassés par des garnements et quand ce sont des petits enfants la responsabilité civile des parents doit être engagée. Berriane ne doit pas être classée commune particulière, nous sommes tous des citoyens égaux en droit et en devoirs», et de terminer «je veux récupérer mes voisins d'abord et mon activité ensuite». Nous avons quitté Berriane avec beaucoup d'amertume et un léger espoir de revoir un jour la contrée paradisiaque refleurir. Ou au moins les murs chaulés effaçant les stigmates de la folie juvénile.