Malgré les événements du 11 septembre 2001 aux USA et l'éclairage planétaire apporté aux consciences du monde entier, AI a versé dans le brouillage des pistes. La délégation d'Amnesty International, qui séjourne à Alger depuis samedi dernier, a souhaité rencontrer les responsables du ministère de la Défense nationale (MDN) sur la question de la responsabilité de leurs actions. Lors de la première conférence de presse organisée, hier, à Alger, la délégation conduite par Roger Clarck et composée de Mme Simon, de MM.Philip Lutter, Fateh Azmi et Abdelhak Guerchab, qui devait rejoindre l'équipe hier soir, les conférenciers ont réitéré leurs doléances qui ne diffèrent pas de celles présentées par deux fois en mai et novembre 2000. Il s'agit, pour M.Clarck, de «dossiers passés qui existent toujours» et qui s'articulent autour de «l'impunité, la justice, le principe de la vérité» et qui sont «au coeur des besoins pour faire des progrès» dans la question des droits humains en Algérie. A propos de la situation des droits de l'Homme en général et sur les dossiers sensibles de la sécurité et des disparus en Algérie, les membres de la délégation ont été unanimes à dire que les choses sont restées au stade des «intentions» et que les autorités algériennes ont usé de la «rhétorique» en guise de réponse à leurs questions, posées lors des deux visites de l'an 2000. Interrogés sur leur point de vue sur l'évolution de la situation durant leur absence, M.Clarck a indiqué que AI a introduit plusieurs demandes de visa depuis 2000 et que ce n'est que récemment que le ministère des Affaires étrangères a répondu favorablement. AI, qui a suivi de l'extérieur la situation en Algérie durant cette période, compte rebondir sur la question des «crimes commis par les forces de sécurité, les milices armées par l'Etat et les groupes armés». Dans ce sens, les conférenciers informent que les demandes d'audience avec les responsables des ministères de l'Intérieur, de la Justice, de l'Education et de la commission des droits de l'Homme dirigée par M.Ksentini ont toutes été satisfaites sauf celle concernant le MDN, dont les échos sont «peu prometteurs». Que veut AI chez le MDN? Tout simplement, selon les membres de la délégation, savoir ce qui est prévu pour permettre aux responsables de l'armée de répondre de leurs actes et aussi connaître le fonctionnement de la justice militaire. M.Philip Lutter dira, à ce propos, que les événements de Kabylie sont liés à leur souhait de s'informer sur le fonctionnement de la justice militaire. Dans la foulée, il annoncera l'éventuel déplacement de la délégation à Tizi Ouzou où, ajoute-t-il, des avocats ont travaillé sur les cas d'homicides commis par des éléments des forces de sécurité. Des rencontres sont envisagées avec les blessés et les membres de la commission Issad. Le volet de la justice intéresse les membres de l'ONG. Ils comptent aller au-delà de la lettre des lois nouvelles dans ce dossier et s'intéresser à l'esprit des textes et aussi au degré de leur application. Le cas des événements de Kabylie est encore une fois cité en exemple. A propos du phénomène du terrorisme, force est de constater qu'il n'y a pas d'évolution de perception sous la bougie d'AI vis-à-vis de ce fléau qui endeuille encore notre pays. Malgré les événements du 11 septembre 2001 aux USA et l'éclairage planétaire apporté aux consciences du monde entier, AI a versé dans le brouillage des pistes en déclarant, par la bouche de M.Clarck, qu'AI «a besoin encore d'avoir des données» sur les attentats en Algérie. Il a cerné les événements en Algérie durant leur absence à la crise en Kabylie, à quelque disparitions forcées et à quelques cas de torture. Son collègue palestinien Fateh Azmi a, lui, parlé «d'équation difficile: sécurité contre droits humains» après le 11 septembre, faisant allusion aux détenus de Guantanamo que les USA leur refusent d'approcher, aux extraditions et avertissant du «risque de voir tous les pays accusés de violation de droits de l'Homme». Signalons qu'au chapitre des disparus, Mme Simon a expliqué qu'il n'y a rien de nouveau dans ce dossier, à la suite de l'entrevue avec l'association SOS disparus, si ce ne sont «les promesses de M.Ksentini». Enfin, la délégation d'AI animera une autre conférence de presse, le 27 février prochain, pour évaluer sa visite de 10 jours en Algérie.