Fédérations et syndicats d'entreprise ont reçu ordre de battre le rappel des troupes en prévision du jour J. Un climat inhabituel règne au sein de la Maison du peuple. Pour qui connaît le «calme» sidéral de cet édifice depuis de nombreux mois, l'animation qui y règne, pareille à celle d'une ruche, renseigne sur les intenses préparatifs liés à la grève générale de demain et après-demain. Les secrétaires nationaux que nous avons pu «coincer», sollicités de toutes parts, nous ont littéralement reçus entre deux portes. Dans le même temps, nos sources insistent pour dire qu'«aucune forme de dialogue, de quelque nature qu'elle soit, n'a été entreprise avec les pouvoirs publics». Ajoutant que «la machine est définitivement mise en marche (et que) plus rien, désormais, ne pourra l'arrêter». S'agissant, donc, d'une quelconque reprise du dialogue social, nos sources signalent que ce dernier «ne pourra reprendre qu'après la démonstration de force de la grève générale de deux jours, suivant les concessions que pourrait faire le gouvernement en signe de bonne volonté». La Centrale, qui ne peut superviser directement l'ensemble des préparatifs, nous expliquent des sources proches de celle-ci, a «chargé ses fédérations, ses unions locales de wilaya et de commune, mais aussi et surtout ses syndicats d'entreprise, toutes branches confondues, de tenir des rassemblements locaux au sein des entreprises, de sensibiliser les travailleurs et de mener de grandes campagnes d'affichage, y compris au sein des sièges d'APC, de wilaya et de ministère». La Centrale a déjà donné l'exemple en faisant paraître des placards publicitaires dans la presse nationale dans lesquels elle appelle les travailleurs à débrayer massivement, explique ses motivations et rappelle ses revendications. Celles-ci, pour rappel, se résument à une révision sensible à la hausse des salaires de l'ensemble des travailleurs, à l'arrêt de la politique de privatisation telle que conçue actuellement ainsi qu'au retrait public et officiel du projet de loi sur les hydrocarbures. Afin d'être fin prêt pour le jour J et de parer à toute éventualité, une cellule de crise, chargée de gérer de bout en bout cette grève, a été mise en place au niveau du siège national de l'Ugta. Elle a pour charge de recueillir les informations du terrain, de transmettre les instructions suivant l'évolution de la situation, de collecter, le moment venu, les taux de suivi dans chaque secteur, dans chaque entreprise et dans chaque wilaya et à l'échelle nationale. C'est cette forme d'organisation, en somme, qui explique le mouvement «inhabituel» enregistré au siège de la Centrale depuis quelques jours déjà. Dans ces préparatifs de «guerre», rien ne semble être laissé au hasard. C'est ainsi qu'à l'occasion de la commémoration du double anniversaire du 24 février, Sidi Saïd a signé un long communiqué dans lequel il revient sur la grandeur de la naissance de l'Ugta en 56, puis la nationalisation des hydrocarbures en 71 à partir de la Maison du peuple avant d'enchaîner sur la grève de mardi et mercredi pour dire en substance qu'elle constitue la suite tout à fait logique de cette démarche nationaliste et patriotique. Cela avant de conclure sur les dividendes attendus de ce débrayage: «Faisons des journées des 25 et 26 février une réussite au seul bénéfice de l'Algérie, des travailleurs et de leur famille». Un autre communiqué rendu public le même jour, manifestant le même souci d'intérêt général, revient une nouvelle fois sur le service minimum qui sera assuré dans tous les secteurs stratégiques du pays. Les fédérations, les syndicats d'entreprise et les unions locales multiplient les communiqués de soutien à ce débrayage alors que de très vastes campagnes d'affichage de sensibilisation ont été entamées dans de nombreuses entreprises aux quatre coins du pays. Certains partis politiques ne sont pas en reste de ce mouvement. Le plus actif soutien en ce sens vient du PT de Louisa Hanoune. Dans un communiqué rendu public hier, le PT soutient de manière inconditionnelle le mot d'ordre de grève. Dans ce communiqué, en effet, on peut lire ce qui suit: «Le Parti des travailleurs considère qu'en plus de la légitimité incontestable des revendications socio-économiques, cette grève générale participe de la légitime défense, de la préservation de la République une et indivisible contre les plans dévastateurs qui menacent les bases matérielles de la nation, son unité et son intégrité.» Quoique de manière moins tranchée, le FFS a, lui aussi, apporté son soutien au mouvement de grève de l'Ugta, gardant quand même ses «distances» par rapport à la direction générale de ce syndicat.