La guerre semble s'inscrire dans la durée et il sera difficile aux alliés de tempérer les ardeurs de tout bord. Les forces américaines ont largué, hier, sur l'Irak «pour la première fois dans un conflit armé» un nouveau type de bombe à fragmentation, capable de braver le vent et les conditions météorologiques, a annoncé le Commandement central américain au Qatar. Six «CBU-105» ont été larguées par des bombardiers B-52 à 17H15 locales. Les bombes à fragmentation sont des munitions controversées, dénoncées par les ONG pour leurs effets dévastateurs sur les populations civiles. Les experts considèrent que 10% d'entre elles n'explosent pas sur le moment, pouvant être activées des mois, voire des années plus tard. Leur menace est assimilée à celle des mines. Les bombardements américano-britanniques deviennent de plus en plus intenses et violents. Ils visent désormais les infrastructures de base, n'épargnant ni civils, ni hôpitaux, ni sites religieux et culturels. Cette nouvelle «stratégie» a été précédée d'une violente campagne médiatique de la presse américaine, qui a notamment critiqué le déroulement des opérations sur le terrain. Aucune ville n'a été complètement prise et la résistance irakienne continue à Bassora, Najef, Mossoul et Nassiriyah. Les frappes aériennes sont dirigées contre des secteurs qui pourraient être des voies d'accès pour une éventuelle offensive contre la capitale. Ce glissement «des frappes chirurgicales» vers les bombardements massifs porte le nombre de victimes civiles à 793 Irakiens tués, et à 5601 blessés, selon des officiels irakiens. Dans ce déluge de feu qui prélude au bain de sang, les troupes américaines ont effectué une percée vers Bagdad hier matin, en contournant le verrou de Kerbala, ville sainte chiite située à 80 km au sud de la capitale, selon les sources américaines. Un responsable du commandement central américain au Qatar a indiqué que les forces américaines ont lancé, toujours hier, des attaques terrestres et aéroportées contre quatre divisions de la Garde républicaine irakienne défendant Bagdad. Les troupes américano-britanniques sont entrées dans une «phase décisive» au sud de Bagdad, mais celle-ci «peut prendre du temps», a de son côté affirmé à Londres le chef des forces britanniques dans le Golfe, le général Brian Burridge. Le commandement central (Centcom) américain a réitéré ses craintes d'attaque chimique ou bactériologique irakienne au cas où ses forces franchiraient une «ligne rouge» autour de Bagdad. Un argument pour expliquer les lenteurs des troupes alliées vers Bagdad? La guerre semble s'inscrire dans le temps et il sera difficile pour les alliés de tempérer les impatiences de tout bord. Répondant aux informations diffusée par les sources américaines, l'Irak a démenti la destruction d'une division d'élite. «Les allégations (américaines) n'ont aucun fondement et font partie d'une campagne hostile à l'Irak», a déclaré un porte-parole militaire irakien en réponse à une déclaration d'un responsable du Commandement central (Centcom) américain annonçant que la division Bagdad de la Garde républicaine déployée dans la région d'Al-Kout (150 km au sud-est de Bagdad) avait «été détruite». Au même moment, narguant l'armada américano-britannique, Saddam Hussein a une nouvelle fois appelé les Irakiens à combattre «les envahisseurs», promettant «la victoire» à son peuple. Dans un nouveau message lu en son nom à la télévision satellitaire irakienne hier, il a affirmé que l'Irak n'avait pour le moment engagé que «moins du tiers» des forces armées irakiennes. Par ailleurs, les forces américaines affirment avoir délivré un prisonnier de guerre lors d'une opération de sauvetage. Jessica Lynch, une jeune fille de 19 ans, faisant partie d'un groupe de militaires d'une unité de logistique, a été capturée à la suite d'une embuscade dimanche près de Nassiriyah (350 km au sud-est de Bagdad).