Le temps des diversions a vécu. La crise de la Kabylie serait sur le point d'être réglée à la faveur de la «lune de miel» annoncée en grande pompe entre les tenants du pouvoir exécutif en Algérie. Plusieurs signes avant-coureurs l'attestent. A l'instar de ce regain de mobilisation dont a fait montre le mouvement des ârch lors de ce double anniversaire du Printemps berbère et du Printemps noir. Mais aussi à cette soudaine disponibilité au dialogue de la part des autorités et des délégués du mouvement citoyen. Des sources fiables nous ont indiqué que le succès des marches organisées le 20 avril dernier en Kabylie est autant dû à l'esprit de magnanimité dont ont fait preuve les pouvoirs publics qu'au sens de la responsabilité qui a prévalu chez les délégués des ârch. Une majorité d'entre eux semble avoir définitivement opté pour la solution négociée de la crise qui perdure depuis 2 années. Après avoir pesé de tout leur poids sur le mouvement, les partis politiques tels le RCD et le MDS ont fini par comprendre, bien que tardivement par rapport au FFS, et à leurs dépens, les enjeux véritables de cette crise. La preuve est que lors de cette journée commémorative, les deux formations politiques suscitées ont donné instruction à leurs militants de veiller à la réussite des manifestations de rue et à l'isolement des éléments perturbateurs. A Akbou, où la rue s'est clairement exprimée en faveur d'une solution politique qui prémunisse la région des appétits politiciens, les jusqu'au-boutistes du Mouvement pour l'autonomie de la Kabylie (MAK) n'ont trouvé d'autre moyen d'exprimer leur désarroi que de s'attaquer aux tentes abritant la quinzaine culturelle commémorant l'événement. Plus sérieusement, il convient de dire qu'à la lumière des bouleversements stratégiques survenus à l'échelle planétaire, le consensus est aujourd'hui établi que la fragilité de l'Etat algérien, sérieusement éprouvé par plus d'une décennie de terrorisme et de subversion, ne peut supporter plus longtemps une crise qui menace ses fondements républicains. Le temps des diversions a vécu et les défis immédiats lancés par le récent bras de fer du complexe militaro-industriel américain à l'adresse du monde, ont fini par imposer à tous les acteurs politiques algériens le retour à la raison. Concrètement, alors que le communiqué de la présidence de la République invitant au dialogue les représentants des ârch est attendu avant la fin de ce mois, on croit savoir que les délégués de la wilaya de Béjaïa s'apprêteraient à plancher, dès aujourd'hui, à Amizour, ce lieu symbole du déclenchement des émeutes dans la vallée de la Soummam, sur les modalités techniques afférentes à la concrétisation de la plate-forme d'El-Kseur. Les observateurs s'interrogent d'ores et déjà sur l'après-dialogue. Ira-t-on vers les questions de fond posées par la plate-forme de revendications des ârch? Ou bien ne sera-t-il question que d'un autre simulacre de dialogue? A plus forte raison que tous les rouages de l'Etat semblent être figés sur l'échéance présidentielle de 2004. La question est de taille. Le FFS, baromètre de l'appréciation que fait la population en Kabylie de ces événements, fait le dos rond à toutes ces manoeuvres. Son premier secrétaire, fraîchement désigné, M. Djoudi Mammeri, a laissé entendre le 20 avril dans un entretien donné à L'Expression que son parti attend pour voir. Cependant, des informations circulant dans l'entourage du plus vieux parti d'opposition en Algérie suggèrent qu'une radicalisation par rapport au pouvoir est en gestation en son sein. Elle pourrait aller jusqu'au boycott des partielles prévues et le retrait des élus du parti aux collectivités locales. Cette nouvelle donne devrait donner du fil à retordre aux tenants du pouvoir exécutif en poste.