Le taux de chômage n'a jamais été aussi élevé qu'en cette année 2003. En cette période de mondialisation où il n'y en a que pour le triomphe du capital, d'Internet, des autoroutes de l'information, de la démonétisation, de McDonald's, de Coca-Cola, du règne du GSM et de la téléphonie mobile, du commerce électronique, de la domination du monde par le désormais G7+1, toutes choses auxquelles les anti-mondialistes essaient de répondre du tact au tact, Marshall McLuhan lui-même y perdrait son latin. Village global, peut-être, mais tout semble se passer sans le monde du travail. En Algérie ou ailleurs, les menaces de Sidi Saïd et de ses pairs de par le monde sont tels des coups d'épée dans l'eau. Et pourtant, c'est ce 1er mai 2003 que les syndicats du monde entier ont programmé de battre le pavé, sous un mot d'ordre original : «Le respect!». Les travailleurs veulent se faire respecter, être reconnus. Le modèle capitaliste a, peut-être, pris le dessus sur le modèle socialiste; mais il ne le fait pas sans casse. Le taux de chômage n'a jamais été aussi élevé qu'en cette année 2003. La récession, qui caractérise les principales économies du monde, le ralentissement de l'activité productive, l'importance inconsidérée prise par les agiotages, les spéculations, le maquillage des résultats et des bilans des entreprises, les bidouillages boursiers au détriment de l'investissement et de la création d'emplois, les reculs, voire l'abandon du rôle social de l'Etat, ont causé des torts irrémédiables aux forces de travail. Cet appel au respect semble sonner l'hallali et le réveil des organisations syndicales, réunies sous la bannière de la Confédération internationale des syndicats libres (Cisl) au nom de «Global Unions». Encore la globalisation, mais cette fois côté travailleurs. «Aux quatre coins de la planète, les syndicats répondent à l'appel des organisations syndicales internationales qui revendiquent le respect envers les travailleurs, le respect envers les personnes en général, en ces temps d'incertitudes économiques et politiques internationales», a déclaré le secrétaire général de la Cisl, Guy Rider, qui prendra la parole devant l'hôtel de ville de Moscou, avant d'ajouter: «Nous vivons dans un monde globalisé, où les syndicats doivent proposer des stratégies globales et parler d'une voix globale. Voilà ce que la Cisl, ses affiliées et ses partenaires des Global Unions exprimeront ce 1er Mai en organisant à l'échelle du globe cette action conjointe.» Voilà donc de Vanuatu à Johannesburg, de Maputo à Belgrade, d'Alger à Moscou, les manifestants exigeront le «respect». La liste des activités programmées par la Cisl, disponible sur Internet, comporte des précisions concernant 50 pays dont les organisations syndicales sont affiliées à la Cisl. En Russie, c'est le président de la Cisl lui-même, Guy Rider, qui prendra la tête des manisfestations, aux côtés de la Fnpar, de la VKT et de la KTR. Au Japon, on apprend que les syndicats utiliseront le thème du respect dans le discours du président de Rengo et dans les brochures de la campagne de la Cisl et des Global Unions. Au Kenya, le respect englobera également une mise en exergue des problèmes du VIH, le virus du sida qui se répand à un rythme incontrôlé, et ce n'est pas un hasard si le ministre de la Santé prendra la parole aux côtés du président Mwai Kibaki. Au Benin, une liste de revendications sera remise au ministre du Travail et de l'Emploi. Alors que les syndicats de deux pays africains qu'un conflit frontalier avait opposés il y a quelques années, à savoir le Sénégal et la Mauritanie, organisent une activité transfrontalière, et cela veut dire beaucoup pour la réconciliation entre les deux peuples. Une autre forme de respect. A Londres, un représentant de la Cisl se tiendra aux côtés du secrétaire général des TUC, Brendan Barber, pour délivrer les messages du 1er mai lors d'un rassemblement qui se terminera en apothéose à Trafalgar Square. En Italie, les discours prononcés dans une centaine de villes insisteront sur le thème du respect, avec une insistance sur la paix et la lutte contre le racisme. En France, les organisations traditionnellement connues, comme Force ouvrière et la Cfdt, affiliées à la Cisl, ne manqueront pas de reprendre le flambeau à travers une campagne d'affichage autour des retraites. Au Brésil, aux Etats-Unis même, où le jour du travail est d'ordinaire célébré en septembre, les syndicats organiseront une série d'activités. Vive le 1er Mai.