L'Algérie aurait pu au moins marchander ses potentialités en posant des conditions à son adhésion à l'OMC. Blocage, hésitation, manque de motivation autour du programme de relance économique. Ce sont tous des termes exprimant l'absence d'un choix stratégique qui pourra anéantir définitivement le secteur public. Le Conseil national économique et social (Cnes) continue à tirer la sonnette d'alarme. En dépit du taux de croissance positif (4,1 %) au-dessus de la moyenne par rapport à la décennie précédente, il demeure toujours en deçà des nécessités, ne serait-ce que parce qu'il n'influe pas sur le facteur le plus important qui est le chômage. Un taux de chômage très élevé variant entre 22 et 28 %, un recul du pouvoir d'achat des ménages évalué à 4,1 %, les voyants au rouge sur le plan social constituent, selon les experts du Cnes, des signes pervers. L'hésitation des politiques dans la prise de décisions économiques en est la principale raison. Le même constat a été réitéré dans les rapports concernant le secteur industriel public, menacé d'effondrement à cause de l'hésitation des politiques à prendre des choix concernant le cadre dans lequel les réformes doivent être entamées. Le pire, a estimé le président de la commission de l'évaluation, est que le secteur privé, marqué lui aussi, par la faible motivation, ne pourra prendre la relève, à la vue de ses capacités ainsi que de la politique du crédit actuelle. C'est d'ailleurs l'avis de l'un des principaux acteurs de ces réformes, M.Chakib Khelil, qui, tout en défendant son projet de loi sur les hydrocarbures «gelé», a révélé que l'OMC s'interroge sur le cadre des réformes en Algérie. La précédente session du Cnes avait incité les gouvernants à mettre de côté les divergences politiques et à prendre des actions effectives pour sauver l'économie nationale. Beaucoup d'experts ont explicité cette position par un tout autre terme, d'ailleurs le plus usuel, il s'agit celui de blocages. Mohamed Salah Mentouri a évoqué autrement les choses, hier, dans son allocution d'ouverture. Il impute cette situation à «la faible mobilisation autour de la mise en oeuvre du plan de relance économique» qui se heurte à un système décisionnel réfractaire. Sachant que le Psre a quand même permis le désenclavement des zones rurales et la création de l'emploi. Sur le plan financier, la politique des finances, a indiqué le président de la commission d'évaluation, est chahutée par la croissance délirante des taux de crédit. Il s'est d'ailleurs demandé pourquoi les politiques «obéissent à une logique irrationnelle par rapport à la rapidité de la mondialisation». Le rapport du Cnes constate que la croissance de la sphère réelle en 2002 a été tirée par le Btph et les services. Ces deux secteurs ont connu une expansion, notamment celui du bâtiment qui a atteint les 5 à 7 %. Le reste, à savoir le secteur économique industriel, demeure otage d'un manque de visibilité dans la gestion des réformes. Ce qui est expliqué, selon les conclusions, par une croissance molle. Les incidences deviennent évidentes dans ce cas sur les entreprises publiques qui, selon les experts du Cnes, poursuivent leur lente dérive, à travers les modes rigides de gestion en l'absence d'un cadre de réformes et de mise à niveau réel. Par ailleurs, le Cnes conclut que le rythme de la mise en oeuvre concrète des réformes structurelles et les exigences de la transition vers l'économie de marché et les engagements extérieurs du pays constituent autant de motifs d'inquiétude. En effet, les experts se sont interrogés sur le rythme des réformes par rapport aux échéances de plus en plus courtes. A-t-on pris des décisions pour la protection des secteurs sans oublier l'agriculture, l'industrie, les services, en prévision de nos engagements avec l'OMC? Le Cnes craint que non. D'autant plus qu'aucun secteur n'a fait objet d'une analyse particulière mettant en lumière la nécessité de protection à court et à moyen termes par rapport au délai de maturation d'avantages concurrentiels ou aux nécessités de protection sociale, à l'instar de nombre de pays qui ont su poser des conditions à leur adhésion.