La nouvelle est tombée par surprise comme une tuile sur une pauvre tête inconsciente et innocente, mais elle n´a pas fait de vagues. Il faut dire qu´on a déjà entendu parler de créations de tant de conseils qui oeuvrent en douce, dans l´ombre, sans effet apparent sur la vie quotidienne du contribuable moyen: le Cnes, le Conseil supérieur islamique, le CSM...sans compter les innombrables commissions mixtes supérieures, ad hoc, plénipotentiaires et sans oublier les Hauts commissariats à quelque chose. Il y en a tellement qu´on ne fait plus attention. Enfin, le Conseil national de la statistique est né. Il existe. Son acte de naissance a été signé le 27 août de l´an de grâce 2008, bien qu´il ait été conçu par décret le 15 janvier 1994. Une longue gestation me direz-vous! Qu´importe! Il vaut mieux tard que jamais. Pourtant, on est surpris! Alors qu´on croyait que depuis belle lurette nos gouvernants, qui ne se mouchent pas du coude, criant à la cantonade et à longueur des 4 saisons l´étendue de leur talent dans l´art de gouverner, avaient les instruments nécessaires de navigation. Pourtant, la réalité est amère, triste. Les gouvernements, qui se sont succédé jusqu´ici, ont travaillé au pif ou se sont dirigés grâce à la position des étoiles...comme les rois mages. C´est comme si un capitaine de navire se dirigeait par une nuit sans lune, sans boussole, sans GPS dans une mer déchaînée et brumeuse. Comment ont-ils pu faire jusque-là sans avoir à leur service une institution digne de ce nom-là, avec ses techniciens du chiffre, avec ses soudeurs, ses comptables, ses spécialistes en prospective...moi qui croyais que le Cnes était chargé de cette fonction, je me fourrais le doigt dans l´oeil jusqu´au coude. Il paraît maintenant qu´il ne s´occupe que des questions économiques et sociales. Mais à part cela, qu´y a-t-il? Et puis, depuis un certain temps, le Cnes n´était plus, à ce que l´on murmure dans les travées, en odeur de sainteté dans les rouages complexes du pouvoir qui est plus enclin à suivre les recommandations de zaouïas et des chefferies des clans traditionnels. Donc, le Cnes peut continuer à prêcher dans le désert...Quoi qu´il en soit, Cnes ou CNS, il est impératif que le gouvernement, pour éviter les errements passés, puisse disposer d´un outil statistique performant afin de mieux diriger le radeau de la Méduse qui tangue dangereusement, tantôt vers Charybde, tantôt vers Scylla. Bref, dorénavant (et il n´est pas trop tôt), les Algériens, sous-alimentés d´un point de vue informatif jusqu´ici, sauront le nombre exact de citoyens qui peuvent se payer de l´huile d´arachide agrémentée d´oligo-éléments à près de 900 DA le bidon de 5 litres ou le nombre précis d´Algériens victimes des accidents de la route. D´ailleurs, il serait intéressant de savoir quels sont les véhicules qui sont le plus souvent sollicités par ces accidents: leur origine, leur cylindrée, l´âge et le sexe du conducteur. Comme il serait intéressant de connaître la proportion de harragas qui arrivent à bon port ou celle des égarés qui reviennent sains et saufs. Mais voilà, le Conseil national de la statistique n´est qu´un majliss ech Choura et qu´il ne peut émettre que des recommandations ou des voeux quelles que soient ses doctes études. Et l´Exécutif est libre de s´asseoir sur lesdites recommandations pour une raison ou pour une autre: raison d´Etat, conjoncture internationale et tutti quanti. Quoi qu´il en soit, réjouissons-nous. Un outil moderne est installé: dorénavant, il ne manquera plus un bouton à une guêtre et tant pis si les heureux élus à ce nouvel aréopage (ils sont 37 alors qu´ils auraient pu être 36 comme les chandelles ou 40 comme chez Ali-Baba), vont bénéficier de revenus et d´avantages (et davantage s´il y a affinités) qui leur permettront d´éviter le couffin d´Ould Abbès. Gageons qu´ils ne manqueront pas de se manifester à chaque opportunité qui s´offrira: loi de finances, résolution...