Maître Tabarli, l´avocate de Karim T., était heureuse comme une collégienne en fin d´année scolaire réussie. Le prévenu, condamné à une peine de prison ferme par ce tribunal de Koléa pour coups et blessures volontaires ayant occasionné un arrêt de travail de deux jours, a fortement nié les faits et ce, devant la victime, debout à sa droite et à près de deux mètres. «Pourtant, il y a bien eu une plainte et un certificat médical», coupe, le visage reposé, la présidente qui a sous les yeux les faits dont elle ne gardera que les deux copains (le mot amis étant plus solide pour ces deux gus dont le premier (agressé) a envoyé le second en taule pour une triste détention préventive dont les traces se voyaient depuis Koléa jusqu´à Blida en passant par Oued El Alleug. Maître Zakia Tabarli évoque plutôt une rixe. La preuve? dit-elle, nous avons un certificat médical de trois jours. Et puis, la rixe a eu pour objet l´installation d´un grillage. «Devant le tribunal de Koléa, nous avons eu la relaxe. La victime s´est accrochée et a interjeté appel tout comme le parquet dont le représentant avait requis une peine de prison de deux ans ferme. Le juge, madame la présidente, a été juste. Il avait sous les yeux un dossier et je suis sûre que vous trois allez réprouver la relaxe. Il faut clore définitivement cette affaire entre deux amis, je le répète et c´est malheureux», avait récité la coquette avocate. «Aggravation de la peine», marmonne Younsi, le procureur général juste avant l´intervention percutante de cette «Tabarli» des juridictions (NDLR, en apposition avec Eric Tabarly, celui des océans, disparu dans les eaux en furie). Maître Zakia Tabarli, l´avocate de Karim T., la trentaine, a dû expliquer à Fatiha Brahimi, la présidente de la chambre pénale de Blida, que son client et la victime sont amis. Le malentendu est né depuis que la victime avait accusé son ami du vol d´une grosse somme d´argent. C´est devant ce fantastique trio de la deuxième chambre correctionnelle de Blida que le conseil, motivé au plus haut point, s´était préparé à prendre d´assaut l´attention soutenue de ces deux merveilleux conseillers, Belaïd Oulahcène et Houria Boudissa, un duo en or qui permet à Fatiha Brahimi de dominer ses audiences de la tête et des épaules. Le pauvre Karim dont les traits tirés par l´angoisse de voir la chambre pénale suivre les demandes du ministère public, même si le siège est aujourd´hui occupé par ce sympathique et compétent Younsi qui mord à pleines dents et il a raison d´être ambitieux, dans ce merveilleux monde de la magistrature dont la plus grosse majorité fait ce qu´il y a de mieux, tournant la tête aux tentatives de la «mafia de la périphérie de la justice» et à, allons-y écrivons-le, la corruption. Mais la réserve et surtout la solidarité de l´indivisibilité du siège font que Younsi voudrait bien réclamer la relaxe mais, mais, mais...La victime, elle, est demeurée debout depuis qu´elle avait dramatisé les faits. Il avait une rancoeur rien qu´à voir la tête qu´il faisait-cet ami-copain-adversaire-victime avait même, avions-nous décelé dans son méchant regard qu´il allait balancer un «concombre» en pleine face de Karim qui, lui, avait, par moments, envie de crier haut et fort: «Bon sang, deux jours d´arrêt de travail m´ont valu tous ces désagréments et huit jours de détention préventive. Mais alors, qu´aurais-je pu récolter si le certificat médical avait mentionné deux mois d´incapacité?» L´essentiel est que ce pauvre bougre soit rentré chez lui libre, définitivement libre, après une assez longue mise en examen. Il est vrai que ces dossiers sont légion. Brahimi décide de mettre en examen pour une bonne semaine l´affaire, avant de reconduire le verdict de ce formidable Hadj Rabah Barik dont on loue les audiences, surtout qu´il vient de perdre son collègue et ami qui est descendu des hauteurs de Koléa vers les profondeurs de Chéraga où l´ami-collègue Liamine Louael, un autre géant des pupitres, compte bien clouer au pilori ses détracteurs, heureusement pas nombreux, contrairement à ses fans. Le duo d´avocats Maître Mohamed Djediet et Maître Ouali Laceb, en tête. Maître Tabarli, elle, voulait montrer sa joie pour ce bon verdict, mais elle a dû se retenir en attendant d´autres succès.