A moins d´un cheveu, deux jeunes auraient pu être devant le tribunal criminel, mais le sort aura été plus favorable... L´affaire du jour oppose deux jeunes dont l´un aurait été attaqué de nuit en tombant dans une embuscade. Des coups de couteau auraient été à la base d´un arrêt de travail de quatre-vingt-dix jours. L´article 264 du Code pénal est «l´étoile» de ce procès. Il est vrai que cette victime de graves coups et blessures est, ce mardi, face à Nadia Amirouche, qui avait signifié l´inculpation aux deux jeunes détenus, qui ne voulaient pas regarder du côté de la victime, pour coups et blessures volontaires. Le jeune présumé inculpé va encore rappeler au tribunal ce qu´il avait enduré lors de cette nuit infernale où il avait failli perdre la vie. Puis, comme c´est la coutume, tout le monde parle en même temps. Amirouche reprend vite l´audience en main. La victime reproche à ses deux présumés agresseurs de venir au quartier débaucher les jeunes. Ils vendent de l´alcool, de la came, violent l´intimité du voisinage, la nuit venue. Et le jour où je suis venu leur rappeler de quitter les lieux car ils ne résident pas dans notre quartier, ils ont décidé de me liquider. L´usage de l´arme blanche et le certificat médical en sont les preuves. A un moment donné, il y a, à la barre, un sacré brouhaha. La juge rétablit l´ordre en...silence. Nadia Amirouche, la présidente de la section pénale de Hussein Dey va presque s´amuser à faire de l´humour: «Voilà un jeune qui s´était automutilé puisqu´il détient un certificat médical d´incapacité de trois mois. Alors qui a agressé la victime? Pourquoi vous-a-t-il désignés? Et d´ailleurs, vous aviez frisé la criminelle avec cette histoire d´usage d´un poignard qui a causé de gros dégâts», avait balancé, sans sourire, la magistrate alors que Zahia Houari, la procureure de l´audience, suivait religieusement les débats avant de requérir et gros, SVP: «Les faits sont graves. Il y a eu des coups ayant occasionné de graves blessures qui auraient pu donner la mort. Oui, c´est grave.» Maître Achour Benaâdja est serein dans son intervention. Il tente de mieux expliquer une grave situation que la victime avait esquissée. La victime a eu honte de continuer ce qu´ils faisaient dans le quartier: «Immoral, insupportable, incroyable, mais vrai. Hélas! ces jeunes étaient décidés à aller jusqu´à la mort, avait expliqué l´avocat qui avait rappelé que la victime était un Algérien modèle qui était revenu d´Angleterre avec un métier, et un métier qui n´est pas de la rigolade. Enfoncée dans le siège du ministère public, Zahia Houari, la procureure demande trois ans de prison ferme avec, à l´appui, le pourquoi de telles demandes comme souligné plus haut. Maître Aïni Baraka, l´avocate de Liès et Zizou, les deux détenus, affirme que ce sont deux charmants Koubéens qui, peut-être, se battent de temps en temps. Mais ils ne sont jamais armés de couteaux. Ils n´ont jamais revendu de drogue. Ils ne commercent que dans le "Vert et Blanc" de l´EN. Zizou et Liès sont franchement innocents», dit-elle, «non pas par intime conviction, mais par absence totale de preuves et le tribunal doit s´y accrocher car la raison veut que sans preuves, il n´y a point de condamnation», continue l´avocate, avant d´asséner: «Quatorze jours après la pseudo-agression, la victime dépose plainte. Ce n´est pas croyable. Pourquoi avoir attendu tout ce temps pour se plaindre avec, comme aide inespérée, un arrêt de travail de douze semaines? Il y a un doute dans cette histoire, surtout qu´un certificat médical ne prouve jamais l´identité de l´auteur de coups et blessures. Et puis, y a-t-il un seul témoin qui a vu les deux détenus poignarder la victime? Vous n´avez que ses propres déclarations. Et là aussi, le doute doit guider le tribunal car l´inculpation est du vent, rien que du vent.» Les parties en présence s´étaient exprimées en toute liberté et jamais le tribunal n´avait cette impression de voir les «choses» lui échapper tant la rigueur et la souplesse étaient présentes ce mardi. Il y avait aussi cette pression mêlée à de la haine constatée au début de l´audience et qui avait baissé au fur et à mesure que l´on avançait dans l´instruction menée de main de maître par une éblouissante Amirouche qui fait des pas de géant en rendant justice sans trop forcer, passant outre les mots qui fusent, échappant aux justiciables qui ne pensaient pas forcément à ce qu´ils disaient sous l´effet de la colère. Il faut souligner ici et ce n´est que justice, la présidente se comporte bien. Elle ne fait ni dans les exclamations ni dans les cris, dans les élans incontrôlables et autres débordements provocateurs souvent relevés par ailleurs. Et lorsqu´elle avait annoncé la mise en examen sous huitaine du dossier, tout le monde s´était senti bien, très bien même, y compris la victime...