De là à avancer que le Président, en pointant du doigt, avait en pensée une nouvelle manière de procéder au changement de gouvernement, il n´y a qu´un pas à franchir. C´est l´air songeur et inquiet que nos ministres ont quitté la Présidence de la République mardi dernier. Comme des élèves à qui on vient d´annoncer la tenue des examens. «Chaque membre du gouvernement devra assumer ses responsabilités», leur a lancé le président de la République au cours du Conseil des ministres de mardi. Un rappel des obligations ministérielles a double signification. D´abord, qu´il ne faut pas confondre stabilité institutionnelle et ronronnement. Ensuite, la précision du président de la République n´aurait pas lieu d´être si tout baignait dans l´huile. C´est donc une véritable mise en garde à laquelle ont eu droit nos ministres. D´autant que le chef de l´Etat a aussitôt ajouté qu´il faudra à chacun des ministres «rendre des comptes de l´exécution du programme dans son secteur...Nos délibérations futures nous permettront d´y veiller régulièrement et de près». On sent à travers ces propos que le Président commence sérieusement à perdre patience et est décidé à ne plus couvrir ceux qui traînent les pieds. Une manière implicite aussi de dire qu´ils existent. Que tous les membres du gouvernement ne sont pas sans reproches. Que s´il a reconduit en bloc la même équipe c´est bien pour d´autres considérations plutôt que pour une quelconque performance collective. Le chef de l´Etat confirme par là ce que l´opinion publique sait déjà. Par exemple que les résultats du secteur des travaux publics n´ont rien à voir, mais alors rien de rien avec ceux de la pêche par exemple. Il y a même des ministres qui ont l´art de se faire oublier. Il y a ceux qui collectionnent les grosses bêtises. Il y a ceux qui pataugent et font du surplace. Il y a ceux qui font dans le bricolage. Mais il y a tout de même des ministres performants. Ils se comptent sur les doigts d´une seule main. Donc, la mise en garde est à prendre vraiment au sérieux. De là à avancer que le Président, en pointant du doigt, avait en pensée une nouvelle manière de procéder au changement de gouvernement il n´y a qu´un pas à franchir. Quand il parle d´évaluation au cours des «délibérations futures» ce n´est pas sans raison. Que se passera-t-il pour les secteurs au résultat négatif? Et si après chaque «délibération future» des délestages sont prévus? On pourrait avoir ainsi par touches successives un remaniement partiel aussi régulier que «les délibérations». En bout de course et bien étalé, l´équipe gouvernementale pourrait subir un changement notable «tout en douceur». On peut même deviner le calendrier. Logiquement, une telle opération, si elle venait à se confirmer, serait achevée avant l´entame de la mise en oeuvre du prochain plan quinquennal. Un nouveau plan qui, pour réussir, doit mettre toutes les chances de son côté. Ceci dès le départ et non en cours de route. Dès le départ et pour toute la composante de l´Exécutif. Pas seulement les ministres puisque le Président a été on ne peut plus clair quand il a évoqué l´exigence «d´une mobilisation et un engagement exemplaire du gouvernement ainsi que de l´ensemble des cadres et agents de l´Etat». Traduction: jusque-là cela n´a pas été toujours le cas. S´il est vrai que l´ordre du jour de ce dernier Conseil des ministres concernait essentiellement la présentation par le Premier ministre du projet de Plan d´action qui sera soumis au Parlement, ainsi que la communication du ministre de la Santé sur les mesures de prévention prises pour faire face à la menace du virus H1N1, ces points ne peuvent masquer à des observateurs avertis l´importance de la mise en garde présidentielle. Nos ministres l´ont bien compris. C´est pourquoi ils étaient songeurs et inquiets à la fin de la réunion. Pas d´autre alternative que de se ressaisir ou disparaître. Un ministre averti... ([email protected])