Nos 13.000 éleveurs ont produit 2,45 milliards de litres de lait en 2009. 1,5 milliard de litres suffisent à couvrir l´ensemble de nos besoins en sachets de lait. Alors, c´est quoi cette nouvelle agitation autour du sachet de lait? Cette histoire de lait commence à bien faire. Certains transformateurs nous la resservent un peu trop. Cette fois, une petite poignée d´entre eux, une dizaine plus exactement sur les 129 transformateurs de lait recensés par le ministère de l´Agriculture à travers le territoire national, s´essaient à jouer aux malins. Alors, c´est quoi la dernière? Le quotidien El Watan rapporte dans son édition d´hier, les arguments de toutes les parties (les transformateurs en question, le ministère de l´Agriculture et la Confédération des industriels et producteurs algériens (Cipa). Cette poignée d´industriels nous prévient «d´une grave crise dans les prochains jours». Il s´agit, vous l´avez deviné, du sachet de lait. Pourquoi? Ces mêmes transformateurs mettent en cause «la diminution des quotas (de poudre de lait) qui ne touche que les laiteries privées». Ils y ajoutent la limitation qu´on leur impose de ne commercialiser leur production que dans la wilaya où ils sont implantés. Avant d´aller plus loin sur ces griefs quelques explications s´imposent. D´abord, il y a cette confusion: les transformateurs ne sont pas producteurs de lait. Les seuls producteurs de lait sont les 13 000 éleveurs algériens. La levée de boucliers à laquelle nous assistons aujourd´hui ne concerne que la poudre de lait, importée bien sûr. Nos 13.000 éleveurs ont produit 2,45 milliards de litres de lait en 2009. Savez-vous combien il en faut pour couvrir l´ensemble de nos besoins en sachets de lait? 1,5 milliard de litres! La moitié de ce que donnent nos vaches. Pourtant, l´importation de poudre de lait se poursuit. En 2009, nous en avons importé 121.000 tonnes. Faisons court et simple. Nos vaches suffisent aujourd´hui, pour toute la demande algérienne en sachets de lait. Non seulement elles suffisent mais elles en donnent presque le double. N´est-ce pas qu´on s´éloigne de «la grave crise dans les prochains jours» qu´agite notre poignée de transformateurs. Oui mais le boucan qu´ils font, c´est quoi? Attendez, on y arrive! Finissons-en d´abord avec cette histoire de quotas, leur deuxième grief. «L´objectif est l´augmentation de l´intégration du lait cru dans la production de nos transformateurs...celle-ci était de 18% en 2009, elle devrait doubler cette année pour passer à 35%», précise la Cipa. On le croit aisément quand on apprend par le ministère que plus de 14.000 génisses ont été importées en 2009 contre seulement 1200 en 2008. Visiblement, il y a quelque chose qui gêne notre poignée de transformateurs dans ce passage de la poudre à la vache. Venons-en maintenant à la commercialisation des produits de ces transformateurs. «Pourquoi une laiterie implantée à Alger irait vendre le sachet de lait à Khémis Miliana?», s´interroge la Cipa. Et nous aussi. Tant que l´offre couvre la demande locale, pourquoi aller l´écouler ailleurs? «Avec cette mesure, les parts de marché des producteurs de sachet de lait vont se rétrécir. C´est déloyal!», ose un transformateur. Le mot est lâché: «déloyal». Est-il loyal qu´un transformateur, étranger de surcroît, collecte du lait cru exclusivement pour ses yaourts? Ouvertement, sans retenue. Avec comme cynisme en prime, la photo de l´éleveur sur le pot. Pour gagner dix fois plus que le sachet et avec la même quantité! Est-il loyal de n´avoir recours qu´au chantage du sachet quand il s´agit d´engraisser cette poule aux oeufs d´or que sont les fromages et yaourts? En toute loyauté, il faut que le bluff cesse. Le ministère rassure. «Il n´y a pas de pénurie de lait!» Mais laissons le mot de la fin à la Cipa qui avertit: «Si certaines laiteries ne veulent pas produire, d´autres le feront.» C´est l´histoire du lait sur le feu qui tourne et ne monte pas. Comme cette fois! Le test de représentativité sera pour une autre fois. ([email protected])