La fierté a ses limites. Dans ces zones reculées, la colère tonne comme ce magma qui a brisé la vie de milliers de personnes en ce 21 mai. «On souffre du manque d'eau. On perd patience à attendre les tentes qui n'arrivent pas. On est délaissé par nos responsables locaux.» Des mots pleins d'amertume lâchés par ces rescapés de la mort. Ils sont là, assis à même le sol, guettant des yeux la route d'en face, celle de l'espoir qui leur permettra de sortir de l'ornière. Ils accusent la fatalité, le malheur qui s'est abattu sur eux. , enfants, hommes, jeunes ou moins jeunes, les bras croisés, regardent les restes de leurs «chaumières» ravagées par ce cataclysme naturel. Que peut faire la force de l'âme contre les caprices de la nature ? Rien. Depuis, cette soirée fatale, on leur a promis «monts et merveilles» mais, la réalité est tout autre. La résignation a atteint ses limites. Ils ne reste que cette candeur, cette fierté pour consommer ses journées et quelquefois «rêver la nuit». Tous les projets inscrits dans les mémoires de ces «déracinés» de leurs biens sont vite oubliés. Les jours passent et se ressemblent avec cette pensée qu'on est délaissé par les responsables. A quelques kilomètres de Dellys, se dresse un petit village. Hier, très beau, il est aujourd'hui détruit. Pourtant, Baghlia, qui a vu naître Boudaoud, ce responsable de la fédération de France durant la lutte armée, n'est que cette bourgade où il fait bon vivre. Région riche en agrumes, ce «petit paradis» a vivement ressenti les effets néfastes du séisme. La population locale a réagi très vite pour «colmater» les brèches. Quelques tentes, dressées çà et là, témoignent de l'absence totale de l'Etat. «On ne peut vivre indéfiniment cette situation», nous confie Mouloud, père de 6 enfants et dont la femme a péri dans ce séisme. «Ils nous ont oubliés», crie Taous, femme de chahid, qui espère réparer son taudis avec la faible pension touchée semestriellement. Le désespoir est lisible sur les visages de ces miraculés de la tourmente.