«Depuis 1983 on nous a gavés de promesses sans lendemains» Violents affrontements entre les jeunes de la cité et les forces anti-émeutes Et voilà! Encore des émeutes des mal-logés. La cité Diar El Mahçoul, relevant de la commune d´El Madania ex- Salembier, faisant face au musés de l´Armée à Riad El Feth, a été le théâtre de violents affrontements entre les jeunes de la cité et les forces antiémeute tout au long de ces dernières vingt-quatre heures. Les heurts qui ont éclaté la veille soit aux environs de 20h et qui avaient cessé d´autres affrontements de même nature sont survenus non loin de là à la cité Diar El Afia. «On leur a promis 168 logements», s´exclame un jeune émeutier encagoulé. «Notre cité que nous devons à la puissance coloniale est l´une des plus vieilles d´Alger, elle a été bâtie en 1955. Mais alors qu´on nous a ignorés, on a préféré reloger ceux de la cité récente de Diar Echems et d´autres», clament les émeutiers enragés. «Depuis 1983 on nous a gavés de promesses sans lendemains», commentent-ils. Une tension électrique régnait à notre arrivée dans ce quartier. Sur une des façades lépreuses de la cité, une banderole en rouge, identifiait la cité El Mahçoul à «la cité De Gaulle». Un vieux tacot calciné occupe la chaussée, des débris de verre des ordures parsèment également les voies longeant le monument des Martyrs. «Ecrivez que la nuit les policiers tirent des bombes lacrymogènes à l´intérieur des maisons en causant des traumatismes et blessures aux petits enfants et bébés, j´ai moi-même évacué un nourrisson hier à l´hôpital Mustapha- Pacha», lance un jeune visiblement très courroucé. Alors qu´un dispositif impressionnant de CNS se tenait à distance du lieu des émeutes, des dizaines d´autres policiers avec des boucliers, matraques à la main, sont postés à proximité de la cité. Tout d´abord, les policiers observaient sans intervenir la scène qui se déroulait devant leurs yeux. Tout à coup les groupes de jeunes en colère et surchauffés leur lancent des pierres et briques et des autres projectiles. Aussitôt les policiers les assaillent à leur tour avec des jets de pierres et sporadiquement avec des bombes lacrymogènes. Les échanges ne sont pas près de s´arrêter et des projectiles de policiers ont brisé une vitre sur la façade de la cité. Cela a fait monter la colère d´un cran. Les émeutiers prêts à en découdre grimpent sur le toit de l´un des immeubles de la cité et appuient les protestataires d´en bas. De là, les jeunes balancent tout ce qui est à portée de main. Les pétards, les projectiles lancés avec des lance- pierres et à main nue pleuvent sur les policiers. La situation a encore dégénéré lorsque les jeunes de la cité voisine dite la cité Confort, autrement mieux lotis que les frondeurs, épaulent les émeutiers en ouvrant un autre front de l´autre côté de la route. Youcef, un quinquagénaire habitant la cité Diar El Mahçoul avoue son appréhension quant à la tournure prise par ces affrontements. «Ça ne s´apaisera jamais», estime-t-il. «On vit à 14 et 15 dans un trou d´à peine 28 m2, et les cas de ceux qui occupent à 12 et 13 personnes un même studio de 20 m2 ou un F1 sont légion ici», nous confie-t-il. «Nous dormons à tour de rôle, et pour avoir un moment d´intimité avec l´épouse, nous sommes obligés de louer une chambre à l´hôtel», a fait savoir Samir, un célibataire endurci âgé de plus de 40 ans. «Force est de constater que tous les jeunes de la cité s´adonnent d´une façon ou d´une autre à la drogue, psychotropes et autre substance», avoue Youcef. «Une bonne partie des jeunes qu´on appelle des Baltaguia sont nos jeunes vivant dans la misère qu´on n´hésite pas à exploiter», ajoute son compagnon. Par ailleurs, les renforts de la police ne cessaient d´affluer durant l´après-midi d´hier. Plusieurs blessés ont été enregistrés dont deux policiers, selon les témoignages recueillis sur place.