Les Etats-Unis et l'Iran ont salué le coup de force contre l'opposition iranienne en France. Quelques heures après l'opération de police qui a conduit à l'arrestation de 159 militants de l'organisation des moudjahidines du peuple, le ministre français de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, déclarait au Parlement que les personnes interpellées voulaient installer «leur base-arrière en France». Cependant, un tout autre son de cloche est développé par les avocats des opposants iraniens, William Bourdon et Marc Henzelin. Il s'agit, selon eux d' «arrestations à grand spectacle». Ces deux avocats ont souligné dans un communiqué rendu public hier que «le mouvement des moudjahidine, accueilli depuis de nombreuses années en France n'a, à leur connaissance, jamais été mis en cause dans une affaire de terrorisme», et que «pour l'essentiel, leurs membres, ont le statut de réfugiés politiques». L'ex-président iranien Abolhassan Beni Sadr, en exil en France depuis juillet 1981, a, lui, estimé «qu'il n'y a pas d'explication claire» à l'opération de police. Antoine Sfeir, expert français spécialiste de l'Orient, notait de son côté le «timing étonnant» de ces interpellations. Il a évoqué soit «un coup de main des Français aux Américains», soit au contraire «un coup de pouce de Paris au gouvernement iranien». Téhéran, pour sa part, a salué comme «un pas positif» les opérations de police. L'administrateur en chef américain en Irak, Paul Bremer, s'est déclaré quant à lui, «content» de l'opération menée en France contre le groupe d'opposition iranienne. Satisfaction américaine affichée par le porte-parole adjoint du Département d'Etat, Philip Reeker, qui a déclaré: «Nous nous félicitons des efforts qui sont faits à travers le monde pour prendre ce type d'action contre les groupes terroristes». A Londres, un porte-parole des moudjahidine du peuple, principal mouvement d'opposition armée au régime de Téhéran, qualifiait de «grotesques» les accusations de «terrorisme» invoquées par les autorités françaises pour justifier le coup de filet. Un autre porte-parole des opposants demandait, depuis Bagdad, l'intervention du Président Jacques Chirac pour obtenir la libération des militants interpellés. «Nous voulons leur libération immédiate. Le gouvernement français est responsable de leur sécurité et nous demandons au président (Jacques) Chirac de libérer ces personnes innocentes», a affirmé Hossein Madani, au siège du mouvement situé en plein centre de Bagdad. «Je me demande s'il n'y a pas beaucoup de communication là-dedans, s'il n'y a pas la volonté de donner des gages, au régime des mollahs, aux Etats-Unis ou à je ne sais qui», déclarait par ailleurs, Jean-Pierre Becquet, le maire (PS) d'Auvers-sur-Oise. 26 représentants de l'organisation des moudjahidine du peuple iranien étaient encore en garde à vue hier matin, au lendemain du spectaculaire coup de filet lancé la veille, contre le mouvement en banlieue parisienne. Devant les locaux de la DST - où sont notamment retenus Maryam Radjavi, l'épouse du chef de l'organisation, Massoud Radjavi, et l'un de ses deux frères, Saleh Radjavi - une femme faisant partie d'un groupe d'une quarantaine de manifestants s'est immolée. Réfugiée politique résidant à Paris, elle a été transportée à l'hôpital dans un état grave ainsi qu'un homme qui lui a porté secours. Depuis leur arrestation et jusqu'à hier matin, des manifestants campent devant le siège du mouvement à Auvers-sur-Oise, pour réclamer la libération de celle qui a été désignée par le groupe comme «la future présidente de l'Iran» et dénoncent le «marchandage du régime français» avec un «régime des mollahs qui a fait 120.000 martyrs».