L'assassinat hier d'un des chefs du Hamas par l'armée israélienne annule les efforts d'Abou Mazen en vue d'un cessez-le-feu. Il ne fait plus de doute qu'Israël n'a nulle intention de se conformer à l'esprit et à la lettre du processus de paix initié par le quartette (Etats-Unis, Union européenne, Nations unies et Russie) en vue de rétablir la concorde dans la région du Proche-Orient. Israël, ce qui n'est guère une nouveauté, continue à privilégier une vision unilatérale de la paix. Une paix certes estampillée «Israël». Or, Israël ne peut prétendre changer les règles séculaires qui font que la paix se conclut avec ceux qui se battent et pas autrement. Aussi, éliminer les résistants palestiniens, et plus généralement, ceux qui dirigent la résistance palestinienne, a singulièrement l'effet contraire, et empêche de même la direction palestinienne d'arriver à un arrangement avec les mouvements islamistes, Hamas et Jihad islamique, pour la mise en oeuvre d'un cessez-le-feu. L'assassinat, samedi à El Khalil, de Abdallah Kawasmeh, un chef local de la branche armée du Hamas de Cisjordanie, a d'autres objectifs que celui de calmer les esprits ou de faciliter la tâche du Premier ministre palestinien, Mahmoud Abbas, lequel tente de trouver une terrain d'accord avec le Hamas et le Jihad islamique. L'engagement envers la paix d'Israël est tellement peu probable, que le Premier ministre israélien, Ariel Sharon, a ostensiblement «félicité» hier l'armée d'occupation qui vient, une fois de plus de commettre un crime qui éloigne un peu plus les chances de paix que la «feuille de route» s'ingénie à mettre en branle. Ainsi, Sharon déclare «Je voudrais en premier lieu, remercier les forces de sécurité pour l'opération réussie de la plus haute importance menée (samedi) à Hébron (El- Khalil)» ajoutant «Il s'agit d'une opération vitale assurant la sécurité des citoyens d'Israël». Est-ce aussi sûr, surtout lorsque l'on sait que de tels assassinats ont surtout contribué, ces derniers mois, à la recrudescence de la violence dans les territoires et notamment en Israël qui n'est plus un bastion de sécurité pour les Israéliens? M.Sharon devrait pourtant le savoir que la paix se fait avec l'adversaire, l'ennemi? Gageons, toutefois, que le Premier ministre israélien à surtout à l'esprit le fait que la paix ne saurait être, pour lui, que la reddition de la résistance palestinienne. Lorsque l'un des parrains du processus de paix, les Etats-Unis, analysent, peu ou prou, la situation sous le même angle que les Israéliens, c'est-à-dire le «terrorisme» et la sécurité de l'Etat hébreu, il est patent que non seulement aucun progrès n'est envisageable lorsque l'arbitraire entre en compte, mais c'est aussi la «feuille de route» qui est ainsi détournée de sa fonction première. Par deux fois, Israël a donné des coups de canif à la feuille de route, par la tentative d'assassinat du chef politique du Hamas, Abdelaziz Al-Rantissi, la semaine dernière, par le meurtre, samedi, d'un chef militaire de cette même formation. Il a été relevé que ces opérations interviennent dès qu'Abou Mazen était sur le point d'aboutir dans ses négociations avec les mouvement radicaux islamistes, lui faisant ensuite endosser les «lenteurs» de la mise en oeuvre de la «feuille de route». Un jeu machiavélique dans lequel Israël excelle, faire croire à son engagement pour la paix tout en faisant tout pour en rendre les conditions inacceptables pour les Palestiniens. La communauté internationale qui focalise sur le seul «terrorisme» palestinien, tourne le regard ailleurs quand le terrorisme d'Etat israélien sévit au grand jour. Dès lors, ce n'est pas du tout évident que la «feuille de route» réussisse à passer l'intransigeance et l'irrédentisme israéliens, et risque de connaître le même sort qu'ont connu les autres tentatives de parvenir à instaurer la paix entre Palestiniens et Israéliens. L'enterrement des accords d'Oslo par Sharon est là pour le rappeler.