Une fois que le constat de la lenteur de l'avancement de la réforme bancaire et financière est posé, place aux remèdes Après la polémique sur le billet de 2000 dinars, Djoudi ouvre le front des cartes de paiement électronique. «Les banques font dans la passivité.» C´est en ces termes que s´est adressé, hier, le ministre des Finances, Karim Djoudi, aux dirigeants des banques. Cette phrase était prononcée à l´ouverture d´un séminaire sur les instruments de paiement modernes, à Alger, auquel ont assisté les responsables de la Badr, Boualem Djebar, de la Cnep, Djamel Bessa ainsi que ceux de la BDL et du CPA. Cette accusation de passivité n´a pas été du goût de ces dirigeants. Quelques minutes plus tard, la séance inaugurale était levée et c´est pour eux l´occasion de lui répondre. En off. Comme il se doit en pareilles circonstances. «Les réformes ne sont pas tombées du ciel», nous confie un président-directeur général d´une banque publique. «Si blocage, il y a, il faut le chercher dans les hautes sphères de l´Etat», nous est-il confié. Le gouvernement est pris à partie en s´appuyant sur ses derniers reculs lorsqu´il s´agissait d´imposer l´obligation d´utilisation des chèques au-delà d´un certain montant pour les transactions. Idem pour le recul sur l´obligation de la facturation. Si le gouvernement est épinglé sur ces sujets, c´est pour signifier qu´il y a tout un environnement qu´il faut disséquer au lieu de rejeter la responsabilité des retards dans les réformes sur les seuls gestionnaires. On s´interroge aussi sur les motivations qui ont conduit le ministre à lancer de telles accusations en public alors que tout le monde sait que c´est lui qui exerce les prérogatives d´assemblée générale des banques comme c´est aussi lui qui les nomme à leurs postes. Est-ce le prélude à un mouvement dans le corps des gestionnaires? L´incompréhension est d´autant plus grande que le ministre admet que certaines performances ont tout de même été réalisées. Djoudi donne l´exemple du traitement des opérations de paiement interbancaires selon des délais passant de 38 jours à 5 jours. C´est le temps qu´il faut pour traiter un chèque. Mais est-ce bien suffisant? Assurément pas. Les lenteurs sont constatées dans l´installation des terminaux de paiement électroniques qui sont pourtant un outil incontournable pour faire toucher du doigt aux citoyens les résultats de la réforme financière. Certaines sources n´ont pas écarté le fait que les commerçants refusent d´installer des terminaux pour ne pas laisser de traces des transactions et échapper, de la sorte, plus facilement, au fisc. En ces temps de ratés de communication sur le billet de 2000 dinars, il aurait été opportun de présenter un produit qui marche et qui aurait pu susciter l´adhésion de certaines couches de la population. Or, sur 2973 terminaux installés chez les commerçants, il n´a été constaté que 1917 opérations. Autrement dit, un tiers des terminaux ne sont même pas utilisés, selon Nedjla Belouizdad, responsable au sein de la Société d´automatisation des transactions interbancaires et de monétique. A mai 2011, il y a eu 2 millions de retraits par carte bancaire. Très peu, admettent les spécialistes présents au séminaire d´hier. Certains intervenants, à l´instar des représentants de la BNA et de Naftal, ont pris la parole pour axer sur leurs expériences. A Naftal, on peut déjà payer l´essence par carte tandis que la BNA permet à ses clients de transférer les salaires des employés par des moyens électroniques comme elle est fière d´annoncer que les paiements électroniques des clients des grands facturiers comme Algérie Télécom, sont en vigueur. A Air Algérie, l´heure n´est toujours pas au décollage de ce système de paiement pourtant annoncé depuis plusieurs mois. Une fois que le constat de la lenteur d´avancement de la réforme bancaire et financière est posé, place aux remèdes. Le ministre invite les banques à «accompagner les entreprises et les citoyens dans l´utilisation des instruments modernes mis à leur disposition». «Désormais, les performances de nos établissements seront évaluées», a-t-il promis. Ce qui ouvre de belles perspectives d´une guerre froide entre les patrons des banques et le ministre. Au moment où les séquelles des ratages du billet de 2000 dinars ne sont pas encore cicatrisées.