Le doute, désormais, est levé. Le ministère de l'Intérieur est bel et bien partie prenante des attaques menées contre le parti de Ali Benflis. Le ministre de l'Intérieur, Nouredine Yazid Zerhouni, profitant de sa sortie à Constantine avec le Président Bouteflika, a décidé d'abattre son jeu dans un petit point de presse, quasi informel, improvisé avec quelques journalistes. Il apparaît ainsi que «le ministère de l'Intérieur n'a toujours pas validé le 8e congrès du FLN». La raison, explique Zerhouni, c'est que «les services ministériels en charge de ce dossier ont bel et bien reçu de nombreuses lettres de recours de la part de militants et cadres du parti». A la lumière de cette déclaration, il apparaît clairement qu'un complot existe bel et bien contre le FLN et que le ministre de l'Intérieur n'y serait pas tout à fait étranger, puisque de toute l'histoire de l'Algérie indépendante et pluraliste, c'est la première fois que l'administration s'immisce directement dans les affaires internes d'un parti, qui plus est dispensé de tenir son congrès constitutif, à la suite d'assises tout à fait normales et anodines d'apparence. Zerhouni, dans ses déclarations, va encore plus loin en rejoignant les propos déjà tenus par la Coordination des comités de soutien au Président à propos des attaques menées contre certaines mouhafadhate du FLN. Pour le ministre de l'Intérieur, en effet, son «département et les services de police qui en sont dépendants, n'avaient pas à intervenir puisqu'il s'agissait d'affaires internes au parti, menées par des militants contre d'autres militants». Ce genre d'affirmations laisse à penser que Zerhouni connaît l'identité de ceux qui ont attaqué des sièges locaux du parti de Ali Benflis. Mieux, il omet de préciser que même dans le cas de simples conflits ménagers, la police est tenue d'intervenir quand il y a usage de la violence. Que dire alors d'attaques menées par des dizaines de personnes chauffées à blanc, munies d'armes blanches et même, dans certains cas de chiens dressés pour le combat? Qu'aurait répondu Zerhouni s'il y avait eu mort d'homme littéralement sous ses fenêtres? Le ministre de l'Intérieur, qui ne se donne même pas la peine de cacher son antipathie à l'égard de son ancien Chef du gouvernement, accuse aussi celui-ci, comme il l'a déjà fait auparavant, d'avoir «bloqué pendant de nombreux mois le nouveau Code communal à des desseins inavoués». Cette dernière attaque, itérative il faut le dire, ne vise rien moins qu'à aliéner à Benflis l'ensemble de la classe politique dans son combat pour sauver le devenir et la souveraineté de son parti. Tout le monde sait, en effet, que l'écrasante majorité des partis politiques est favorable à un nouveau Code communal qui donne plus de prérogatives aux élus locaux sur les responsables désignés. Le FLN ne peut pas en penser moins puisqu'il détient une majorité assez confortable au sein des Assemblées élues. Ces attaques ne peuvent laisser indifférente la direction légitime du FLN. C'est la première fois, en effet, que Zerhouni admet quasi officiellement avoir partie liée avec les partisans du camp des «anti-Benflis». Il semble même qu'il ait pris le relais de Son Excellence Abdelkader Hadjar, grillé puis contraint de rejoindre son poste à Téhéran. Des rebondissements importants ne sont donc pas à exclure pour les prochains jours. En attendant, Sadi Abdelhak, membre du bureau politique, a accepté de réagir à chaud aux propos tenus par Zerhouni. S'agissant des recours, il se montre catégorique et tranchant, accusateur même: «Les documents, s'il en existe vraiment, sont tous fabriqués. Au exte de loi n'autorise le ministère de l'Intérieur, ni quelque autre organisme, à recevoir des recours de la part de militants mécontents. Il ne s'agit rien moins que d'une flagrante transgression de la Constitution.» S'agissant de ce que Zerhouni qualifie de conflit intra-muros au FLN, M.Sadi révèle que «c'est le ministère de l'Intérieur lui-même qui se trouvait derrière les assaillants», admettant, certes, l'existence de «militants excommuniés» parmi les assaillants même si ces derniers «sont constitués dans leur écrasante majorité, de personnes étrangères au parti et même étrangères tout court». Pour ce qui est du Code communal, enfin, notre source dément catégoriquement les accusations de Zerhouni, précisant que «le document a été bloqué par des gens situés plus haut dans la hiérarchie» sans en préciser les fonctions. Cela avant de lancer un défi à Zerhouni de «remettre sur le tapis le document dès le 2 septembre prochain, date d'ouverture des sessions d'automne des deux Chambres de l'Assemblée algérienne», soutenant que «tous les députés et sénateurs du FLN soutiendront le texte de même que l'écrasante majorité de la classe politique présente à l'APN et au Sénat». Le défi est lancé. Quant à la guerre, tout porte à croire qu'elle ne fait que commencer...