La Turquie pourrait lancer «à tout moment» une incursion terrestre contre les rebelles kurdes retranchés dans le nord de l'Irak qui ont intensifié leurs attaques sur le sol turc, a affirmé hier le ministre de l'Intérieur, Idris Naim Sahin. «Une opération au sol, à l'instar d'une opération aérienne, pourrait être menée à tout moment, dépendant des discussions avec le voisin», l'Irak, où le numéro deux de la diplomatie turque, Feridun Sinirlioglu, s'est récemment rendu pour rencontrer les autorités irakiennes à Baghdad et kurdes à Erbil (nord), a-t-il dit, cité par l'agence de presse Anatolie. Ces propos interviennent alors que la presse turque ainsi que des sources sécuritaires dans le sud-est du pays, théâtre des violences, font état de préparatifs des autorités turques pour une telle opération transfrontalière afin de pourchasser les membres du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans la montagne irakienne. «Nous sommes en train d'évaluer» l'opportunité d'une incursion, a ajouté M. Sahin. M. Sinirlioglu a exprimé à ses interlocuteurs le malaise de la Turquie quant au fait que le PKK utilise la zone kurde irakienne comme un tremplin pour attaquer les forces turques, a-t-on indiqué de sources diplomatiques turques. Il a aussi invité le ministre irakien des Affaires étrangères Hoshyar Zebari en Turquie, à un déplacement qui pourrait, selon la presse, se réaliser courant octobre. Ankara demande aux autorités irakiennes, et spécifiquement à celles du Kurdistan irakien, de mettre fin à la tolérance dont elles sont accusées à l'égard du PKK, et d'assurer l'étanchéité et la sécurité de la frontière avec la Turquie. Des rebelles du PKK ont attaqué simultanément dimanche soir un commissariat de police et une caserne de gendarmerie à Semdinli, localité frontalière avec l'Irak dans l'extrême sud-est, tuant trois civils assistant à un mariage et deux membres des forces de sécurité. Le PKK ne prend généralement pas pour cible les civils dans cette zone kurde. A la suite de cette attaque, le Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, a convoqué lundi une réunion d'urgence des responsables civils et militaires pour évoquer l'éventualité d'une opération terrestre contre les bases des rebelles en Irak, ont souligné les quotidiens Milliyet et Vatan. L'armée a pour sa part renforcé ces dernières semaines ses troupes le long de la frontière irakienne dans l'éventualité d'une incursion, selon une source des forces de sécurité dans le sud-est du pays. L'aviation mène depuis plusieurs jours des vols de reconnaissance dans cette zone, a-t-on ajouté de même source. L'aviation turque a bombardé à plusieurs reprises des caches du PKK en Irak depuis le 17 août, tuant, selon l'armée, plus d'une centaine de rebelles. Le Parlement turc renouvelle chaque année son autorisation au gouvernement pour organiser, si nécessaire, une offensive terrestre contre le PKK dans le nord de l'Irak. Il devrait donner un nouveau feu-vert pour de telles opérations d'ici le 17 octobre, selon la presse. La Turquie a lancé 25 opérations transfrontalières contre le PKK ces 25 dernières années dont la dernière remonte à février 2008. Le but de chaque opération était la liquidation du PKK, mais cette organisation armée, qui lutte depuis 1984 pour l'autonomie des régions kurdes de Turquie, et qui est considérée comme un groupe terroriste par de nombreux pays, n'a pu être défaite.