L'Union européenne a décidé vendredi de durcir encore ses sanctions contre le régime syrien en interdisant notamment tout nouvel investissement dans le secteur pétrolier ainsi que la fourniture au pays de pièces et billets de banques. « Compte tenu de la poursuite de la campagne brutale du régime syrien contre sa propre population, l'Union européenne a décidé aujourd'hui d'adopter des sanctions supplémentaires », a annoncé le chef de sa diplomatie, Catherine Ashton, dans un communiqué. Les détails des nouvelles mesures seront connus samedi lors de leur publication au Journal officiel, qui permet leur entrée en vigueur. Deux personnes et six sociétés seront ajoutées à la liste des sanctions européennes incluant gel d'avoirs et interdiction de visa. Au total, 56 individus et 18 sociétés sont désormais visés. Il s'agit déjà du septième train de sanctions à l'encontre du régime de Bachar al-Assad, accusé par les Occidentaux de réprimer dans le sang le mouvement de contestation, qui a fait selon l'ONU plus de 2.700 morts depuis le début du mouvement mi-mars. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (Osdh), 70.000 personnes sont passées par les prisons. « J'ai dit à plusieurs reprises que la répression du régime contre sa population doit s'arrêter totalement, que les manifestants détenus doivent être remis en liberté immédiatement et qu'un dialogue politique sincère doit s'engager en Syrie », a insisté Mme Ashton. « La pression internationale augmentera jusqu'à ce que le régime réponde aux appels à une fin immédiate de la violence, à la libération des prisonniers politiques et à des changements authentiques », a prévenu de son côté le chef de la diplomatie britannique William Hague. L'interdiction de nouveaux investissements dans le secteur pétrolier vise les compagnies européennes, mais aussi les sociétés syriennes actives à l'étranger. Elle consiste à interdire tous prêts, achats de participations ou créations de joint-ventures avec le secteur pétrolier syrien, a précisé un diplomate. Selon un autre diplomate, elles devraient avoir de l'effet car la Syrie a « désespérément besoin » de nouveaux investissements pétroliers. Cette sanction vient compléter une précédente mesure: Damas est déjà visé par un embargo européen sur les importations et le négoce de pétrole syrien. La Suisse est venue s'y associer vendredi en interdisant elle aussi l'importation, l'achat et le transport de pétrole et de produits pétroliers syriens. Concernant l'UE, l'interdiction d'investissement ne porte toutefois que sur les nouveaux contrats, les anciens pouvant donc continuer à être honorés. Le géant pétrolier français Total est une des principales compagnies étrangères en Syrie avec l'anglo-néerlandais Shell et la chinoise CNPC. Total, qui poursuit actuellement ses activités de production en Syrie, a extrait quotidiennement en 2010 14.000 barils de pétrole brut du sol syrien et l'équivalent de 25.000 barils équivalents pétrole de gaz naturel, soit seulement 1,6% de sa production totale. Selon des diplomates européens, parmi les six nouvelles entités également visées par les sanctions adoptées vendredi figurent une chaîne de télévision, deux sociétés de télécoms, et trois sociétés qui fournissent l'armée syrienne en équipements divers. Des entreprises basées en Autriche, en Allemagne et en Belgique impriment actuellement de la monnaie pour le compte de la banque centrale syrienne, selon des sources diplomatiques. Celles-ci n'auraient plus le droit de lui livrer pièces et billets, en vertu du nouveau train de sanctions. « L'Union européenne sanctionne surtout ses propres imprimeries car il y a d'autres pays sur les quatre autres continents qui sont capables d'imprimer notre monnaie. Il y a beaucoup de choix et l'UE punit ses entreprises », a commenté Adib Mayaleh, gouverneur de la Banque centrale syrienne.