On les appelle communément les allocataires. Les mieux lotis d'entre eux touchaient moins de 75% du Snmg en 2006 lorsque ce dernier s'élevait à peine à 12.000 dinars. Les 2 millions de retraités que compte l'Algérie ont élevé la voix souhaitant que leurs pensions soient relevées de 40%, une des revendications prioritaires de la Fntr-Ugta qui consiste en «l'actualisation des pensions de retraite d'au moins 40%, et ce depuis janvier 2010, au vu des augmentations de salaires attribuées, avec rappel depuis 2008, à tous les travailleurs des secteurs d'activité. Le relèvement de la pension minimum de retraite qui est de 75% du Snmg à 100% du Snmg, le relèvement de l'allocation minimum de retraite qui est de 3500 DA, à un montant de 5000 DA» a indiqué Smaïl Allaouchiche, son SG, dans une interview accordée au quotidien El Moudjahid. Une misère pour les allocataires, l'une des catégories les plus fragiles, sinon la plus vulnérable de la société algérienne qui ne compte que sur la générosité des pouvoirs publics lorsqu'ils sont rappelés à leur bon souvenir pour voir leurs «pensions de retraite» indécemment dérisoires être «augmentées». Ce fut le cas... en 2006. Un texte réglementaire dans le cadre de la loi de finances complémentaire de cette année-là avait été élaboré pour relever les allocations de retraite qui ne dépassaient pas les 75% du Snmg. «Les personnes concernées par cette mesure et dont le nombre est estimé entre 200.000 à 300.000 allocataires, perçoivent actuellement une allocation de retraite inférieure à 7500 DA», avait indiqué Ahmed Halfaoui, qui occupait à l'époque le poste de directeur de la législation et de la réglementation au ministère du Travail. Aujourd'hui, la Fédération nationale des travailleurs retraités affiliée à l'Ugta reconnaît que 360.000 retraités perçoivent une pension inférieure à 10.000 DA, soit 20% des 2.100.000 pensionnés recensés en 2010. Des statistiques approximatives pour des laissés-pour-compte, en quelque sorte, qui viennent tout juste d'être tirés de l'oubli. Si l'amélioration et la préservation du pouvoir d'achat ont de tout temps été le fer de lance des mouvements de contestation tout en définissant l'appartenance de classe de certaines catégories sociales (ouvriers, travailleurs agricoles...), les 360.000 travailleurs qui perçoivent moins de 10.000 dinars par mois pour les mieux lotis d'entre eux (alors que certains vivent avec une allocation dérisoire d'environ 3500 dinars) font figure d'exception. Marginalisés de part leur condition de classe, ils auront vécu sans trop se faire voir ni contester. Une sorte de fatalité que seuls ceux qui, en plus de se lever tôt, doivent ne compter que sur leur unique moyen de production: la terre. Travailleurs agricoles, donc, pour la plupart d'entre eux, ils ont été employés au sein des fameux comités de gestion du temps de la Révolution agraire alors que bon nombre d'entre eux n'ont pas fait l'objet d'une déclaration à la Caisse de sécurité sociale. Bien qu'ayant travaillé jusqu'à l'âge de soixante-cinq ans, ils n'ont pu atteindre les quinze années requises afin de bénéficier d'une retraite en bonne et due forme. Ces forçats des premières années de l'Algérie indépendante ont pourtant admirablement pallié le départ massif des colons français et ont produit ce dont la population avait besoin comme fruits et légumes et en abondance. Ils ont été, en contrepartie, injustement récompensés.