Quand Zerhouni menace de recourir à la force publique, le pire est à craindre. La crise du FLN, qui a déjà focalisé les regards, risque de connaître un basculement dangereux le 14 août. Les militants de base du parti de Benflis ainsi que toutes les kasmas d'Alger projettent de se rassembler devant la présidence le jour où le groupe de Hadjar a programmé la réunion d'Alger qui elle, indique-t-on, réunira des milliers de participants. «Nous rassemblerons dix fois plus de militants qu'eux et nous allons juger sur le terrain», a déclaré sur un ton presque menaçant Abdelaziz Djoghri, membre du comité central du FLN, précisant que c'est aux pouvoirs publics «de prendre leurs responsabilités si des dérives résultent de ces actions». Plusieurs membres du comité central, contactés hier, affirment que leur parti ne se laissera jamais faire «devant la mascarade qui se prépare à la mi-août». Ils affirment, en outre, que des rassemblements et des marches auront lieu avant, pendant et après la réunion du groupe de Hadjar sur l'ensemble du territoire national. Ainsi engagé, ce bras de fer annonce des affrontements imminents. Interrogé par les journalistes à Aïn Defla où il se trouvait en compagnie du Président de la République en visite de travail, Zerhouni a déclaré que la force publique interviendrait si le conflit au sein du FLN se transformait en affrontements dans la rue. Cependant, cette même force publique n'est pas intervenue, alors que des kasmas et des mouhafadhas de ce même parti étaient violemment agressées au vu et au su de tout le monde. Est-ce à comprendre que l'on veut effectivement entraîner délibérément le FLN dans des affrontements dans la rue? Le pire est à craindre quand Zerhouni menace de faire recours à la force publique lorsqu'on sait, que plus que jamais, la répression engendre la violence. Face à cette intenable logique d'affrontements, beaucoup s'interrogent si l'Etat ne s'est pas trompé de thérapie pour sortir le pays de la crise multidimensionnelle. En tout cas, l'affrontement est imminent puisque les deux camps semblent décidés à aller chacun au bout de sa logique. Alors que l'Algérie n'a pas encore pansé ses blessures causées par le terrible séisme du 21 mai, la crise politique que vit le pays s'intensifie, se tasse et la perspective de la présidentielle de 2004 s'annonce en chant de cygne. Les opposants à Benflis affirment qu'ils maintiennent leur rassemblement le 14 août à Alger pour installer la coordination nationale avant d'aller vers un congrès-bis. Ils avancent le chiffre de 4000 à 5000 participants. Selon certaines sources, non confirmées, les participants seraient hébergés au niveau des résidences universitaires de Dergana et d'El-Alia avec la complicité du directeur de l'Onou (?). De leur côté, les fidèles de Benflis n'en démordent pas. «Jusqu'à preuve du contraire, nous sommes la première force du pays. On ne va pas abandonner à mi-chemin, car nous avons des assemblées, des élus et surtout un programme à réaliser», a encore déclaré Djoghri qui reproche au clan adverse d'agir au nom du Président en utilisant le FLN. «Qu'ils s'expriment au nom d'un comité de soutien et ils sont libres de le faire.» La scène politique nationale est véritablement devant une crise inédite. D'un côté, un parti majoritaire au Parlement, aux APC, aux APW et au gouvernement et qui se plaint d'être victime des agissements de l'administration, de l'autre un clan qui veut destituer un secrétaire général plébiscité par un congrès. Face à cette guerre de tranchées entre les deux tendances, les Algériens attendent, quant à eux, des gestes concrets en vue d'améliorer leurs conditions sociales détériorées et totalement éclipsées par ces conflits. Reste que la manière dont les dirigeants traitent les crises politiques résume toute la pratique du pouvoir depuis quarante ans. Une triste réalité !