Renforcer leur contrôle sur les zones sahariennes, avoir accès au coeur de l'Afrique...Les Etats-Unis jouent cartes sur table. L'Afrique éveille aujourd'hui les convoitises et la récente visite de George Bush dans quelques pays d'Afrique australe n'est rien moins qu'innocente et indique la lutte âpre engagée avec les anciens maîtres européens du continent pour la domination d'une région qui s'avère de plus en plus une des clés de la mise en oeuvre du nouvel ordre mondial. Pour le président américain, le prétexte est tout trouvé et, par certains à-côtés de sa manipulation, le terrorisme a bon dos. Ce qui permettra au président Bush d'affirmer: «nous empêcherons le terrorisme de s'enraciner en Afrique» lors de son escale nigériane. Contrairement à son prédécesseur, Bill Clinton, qui s'est exhibé en 1998 dans cette même partie de l'Afrique, sans objectifs précis, George W Bush est venu avec des idées plein la tête, notamment celle d'intéresser les Africains aux rôles d'auxiliaires de la super-puissance américaine. Le président Bush n'a fait ainsi qu'ouvrir la voie à la cohorte de militaires américains de tout grade qui vont sillonner l'Afrique dans l'intention affirmée d'installer des bases permanentes dans les principaux centres stratégiques africains. Des bases, mobiles ou fixes constituent pour les stratèges américains l'une des priorités dans la mise en condition de l'Afrique tant dans la lutte contre le terrorisme, couverture on ne peut plus idéale, que de mainmise sur un continent qui regorge de richesses dont, il ne fait pas de doute, Washington veut s'assurer le contrôle en aval et en amont. Il semble même que l'Algérie et le Maroc, sont, ou seraient, sollicités pour l'octroi de facilités aux forces américaines, en d'autres termes la cession au bénéfice des Etats-Unis de bases militaires dans ces deux pays. C'est dire donc le challenge que Washington compte mener à bien. En réalité, la proximité du Maghreb de l'Europe, son potentiel propre, quoique inexploité, font de l'Afrique du Nord une région très, très, convoitée, d'autant que les événements dont elle fut le centre ces derniers mois, notamment l'attentat de Djerba, l'enlèvement des touristes européens en Algérie, les attentats meurtriers de Casablanca contre des touristes européens, font que la région est au premier rang des préoccupations des décideurs mondiaux. Et puis, le 11 septembre 2001 a totalement fait basculer l'appréciation qui était celle du terrorisme, longtemps considéré, au mieux comme un phénomène local, au pire, comme cela a été le cas en Algérie, comme étant une guerre civile qui n'intéressait pas la communauté internationale. Le réveil par le World Trade Center aura été rude pour tous, et plus particulièrement pour les Etats-Unis, qui faut-il le souligner, ont été derrière l'avènement de cette forme de violence, le terrorisme, par la formation qu'ils ont prodiguée aux Afghans, dans l'aveuglement de leur politique de «containment» de l'avancée communiste en Asie du Sud-Est. Oussama Ben Laden, aujourd'hui ennemi n° 1 de Washington, est tout droit sorti des laboratoires américains. Ces derniers, dans la défense des intérêts et «valeurs» américains, avaient même flirté un moment avec les taliban, et étaient sur le point d'établir des relations diplomatiques avec le mollah Omar avant que ne survienne l'attentat anti-américain de septembre 2001 à New York. Aussi, l'Afrique pépinière du terrorisme international, selon les Américains, inquiète-t-elle les Etats-Unis, surtout si l'on se rappelle que les tous premiers attentats anti-américains l'ont été en Afrique, plus précisément au Kenya et en Tanzanie, en 1998, contre les ambassades américaines à Nairobi et Daâr Es Salem. Dès lors il n'est pas étonnant que les officiels américains multiplient les visites au plus haut niveau dans un continent où la carte du terrorisme s'étend brutalement et prend même le pas sur l'autre fléau africain : la pauvreté. La visite de Georges W. Bush en Afrique pose ainsi les jalons, d'autant qu'elle sera suivie prochainement par celle du chef des forces armées américaines en Europe, visite qui le conduira en Algérie, au Maroc et en Tunisie. Cet intérêt, soudain, de l'Amérique pour l'Afrique est induit par les études de spécialistes de Pentagone, lequel, soucieux des intérêts de l'Oncle Sam dans le continent ne veut pas laisser le champ libre à l'Europe, à sa tête la France, en redéfinissant une politique africaine à la mesure des enjeux de l'heure.